13 novembre 2014
EN QUELQUES MOTS
Texte : Sami Gnaba
Cote : ★★★★
Avec Les Combattants,Thomas Cailley signe un premier film sensuel, exaltant et tout à fait imprévisible, raccordé à la vitesse, à la fragilité mais aussi à l’élan toujours défiant de la jeunesse, celle-là même tiraillée entre ses indécisions (le candide Arnaud) et son désir de grand air libre (l’impulsive Madeleine). Ce sont deux corps, fragiles et puissants à la fois, beaux et sans repères, qui cherchent à inscrire leur présence dans le monde, cette nature spectaculaire, paradisiaque et hostile.
Comme une traversée menée sur diverses stations et vitesses, Les Combattants déborde d’énergie, de vitalité entraînantes; ça court, ça plonge, ça se bat, ça s’étreint, ça bouscule les obstacles et ça se tient debout héroïquement dans sa force et détermination, et affirme son existence. À l’affût, sur ses gardes. Comme dans la dernière et merveilleuse scène du film.
Marqué dans un premier temps par le deuil, l’ennui ambiant d’une ville de province française, tout comme par une certaine mélancolie propre aux jeunes de l’âge d’Arnaud et Madeleine, le film s’ouvre rapidement au mouvement, à l’aventure, celle que l’on se revendique chacun pour soi-même tôt ou tard, accordement à nos propres désirs, à nos rêves, quitte à rompre avec les attentes placées en nous par les parents, la communauté. Celle dans laquelle on se projette, par l’euphorie du sentiment amoureux aussi. Comme lancés dans un geste d’affranchissement total, ouverts à tous les possibles.
L’attitude frondeuse de ses protagonistes est aussi transposable dans la mise en scène de Cailley, remarquable, bousculant par exemple la typologie des personnages masculins et féminins de son film. Du coup, Madeleine (interprétée par la définitivement indispensable et magnifique Adèle Haenel), la survivaliste qui sent que la fin du monde arrive, nous est présentée comme le personnage-type du héros, désinhibée de toute fausse pudeur, excentrique à souhait et imposante, tout le contraire du réservé et sensible Arnaud.
L’autre grande part de séduction émanant de ce premier film vient aussi de la liberté et l’aisance avec lesquelles Cailley traite son récit. À des lieues du registre de la comédie française grand public toute tracée, Les Combattants lorgne plutôt l’horizon du cinéma américain, s’offre des dérèglements en cours de route irrésistibles (la partie dans les bois, superbe), glisse continuellement d’un genre à un autre, moyen pour le film et Cailley de partager avec ces personnages ce même désir de repousser les limites, les conventions – la comédie romantique cèdant en mi-parcours à la comédie militaire très années 80 pour se transformer en film d’apocalypse… Une fois arrivés au bout de l’aventure, on en redemande encore, tellement le film est libre, drôle et séduisant!
Genre : Comédie dramatique | Origine : France – Année : 2014 – Durée : 1 h 38 – Réal. : Thomas Cailley – Int. : Adèle Haenel, Kévin Azais, Antoine Laurent, Brigitte Roüan, William Lebghil, Thibaut Berducat – Dist. / Contact : K-Films Amérique | Horaires / Versions : Beaubien – Cineplex
CLASSIFICATION
Visa GÉNÉRAL
MISE AUX POINTS
★★★★★ (Exceptionnel) ★★★★ (Très Bon) ★★★ (Bon) ★★ (Moyen) ★ (Mauvais) 1/2 (Entre-deux-cotes) – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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