28 mai 2015
Essai cinématographique tourné lors d’une traversée de l’océan à bord d’un navire de charge.
Lumineuse ode à la mer et à ces milliers de marins anonymes qui voyagent sur elle, Transatlantique a été réalisé, mis en images et en sons par les trois frères Dufour-Laperrière qui, durant plus de trois semaines, ont filmé de l’intérieur une traversée reliant l’Europe du Nord et Montréal effectuée sur le Federal Rideau, un navire cargo canadien battant pavillon chinois.
Il est des documentaires, mi fictionnels, mi réalistes, qui demandent au spectateur une attention particulière et un abandon total. Dans la courte liste de cette catégorie, le Miron : un homme revenu d’en dehors du monde de Simon Beaulieu est encore frais en mémoire. Poursuivant une démarche entreprise dans plusieurs courts métrages, Félix Dufour-Laperrière nous livre Transatlantique, un essai artistique inclassable à l’esthétique hautement travaillée. Un premier long métrage remarqué au dernier FNC puis aux RVCQ, où il fut récompensé du prix Pierre et Yolande Perreault décerné au réalisateur du meilleur premier ou second documentaire.
Unique objet tout en sensations, usant des répétions qui marquent invariablement un si long périple, le film vit au rythme des tempêtes, des moments de détente, de prières et d’inspections dans les cales ou dans la salle des machines (plusieurs scènes filmées là sont impressionnantes). Si ce poème sacré composé d’autant de terreur que de fascination laisse une large place à la contemplation et à l’abstraction, il ne perd pas pour autant son caractère instructif en montrant sans avoir à forcer le trait documentaire l’emploi du temps de ces marins étrangers (bien que non précisée, leur origine doit être indienne). Nettoyage des cales, épluchage de patates en cuisine, navigation attentive, le tout sans entrevue, sans sous-titres ni cartons explicatifs. Et l’emploi d’un noir et blanc contrasté mettant en évidence la variation des ombres, la moindre lumière, le plus petit geste de ces êtres minuscules perdus dans l’antre de 35 000 tonnes de métal.
Bien sûr, le style fait immédiatement penser à l’hallucinant Leviathan, de Lucien Castaing-Taylor et Verena Paravel. Et même s’il ne l’égale pas dans sa puissance, Transatlantique a cette rare capacité à évoquer une réalité de manière tout à fait originale, histoire d’aiguiser notre regard de plus en plus formaté. De telles œuvres, ciselées en dehors des modes et du temps, sont rares.
Genre : Essai documentaire – Origine : Canada [Québec] – Année : 2014 – Durée : 1 h 12 – Réal. : Félix Dufour-Laperrière – Dist. / Contact : La Distributrice de films.
Horaires : @ Excentris
CLASSIFICATION
Non classé
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ (Entre-deux-cotes) – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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