10 décembre 2015
Serait-ce possible de se laisser amadouer par le récent film de Wim Wenders, l’une des figures marquantes de la mouvance cinématographique allemande des années 70 ? Jusqu’à un certain temps, pas si lointain, son patronyme suffisait pour que les experts critiques encensent ses dernières créations. Et puis, soudain, le désarroi : une perte d’inspiration, un manque de rigueur, une lente adaptation aux temps qui passent ? Le secret ne sera jamais résolu ou l’est peut-être.
Alors que penser de Every Thing Will Be Fine ? Titre qui ressemble non seulement à une déclaration comme guise de réponse hâtive à ses récents détracteurs, autrefois grands admirateurs, mais bel et bien à une sorte de résignation involontaire. Néanmoins, malgré les échos, en général, défavorables, force est de reconnaître les valeurs intrinsèques d’un film inachevé. Et c’est justement dans sa condition embryonnaire que réside son originalité. Les personnages, laissés à eux-mêmes, se laissent guider par un rapport à l’autre qui relève d’un état extradiégétique, tant ils paraissent comme des fantômes, des revenants de ses premiers films.
Wenders en est conscient, et pour le comprendre, il faut bien observer ce qui se passe à l’écran. Tenter de percer le mystère derrière le for intérieur de chacun des protagonistes, comprendre leur comportement, souffrir comme eux, se rallier à leur crise existentielle.
On pourrait accuser le cinéaste d’avoir fait trop confiance à Bjørn Olaf Johannessen, auteur du scénario, d’une simplicité déconcertante, mais dans le même temps, assoifée de fausses pistes et de forts moments de résignation rédemptrice.
Car Every Thing Will Be Fine est un film de silences, de colères, de liens intimes qu’on laisse s’effriter, mais aussi un film enquête sur le métier de cinéaste, sur les faux pas qu’on peut se permettre de faire par amour du cinéma, pour dialoguer avec le médium et lui dire finalement ses quatre vérités. Wenders n’a peut-être pas réalisé son meilleur film, mais son esprit lucide est encore intact, sa vision du monde aussi aiguisée et surtout et avant tout, on demeure stupéfait devant la persistance qu’il revêt dans sa quête intellectuelle de l’être.
La façon dont chaque critique perçoit un film est une affaire totalement subjective. Dans mon cas, je me suis laissé attendrir par la simplicité candide de James Franco, la maturité sauvageonne de Charlotte Gainsbourg, mais moins par le manque d’intérêt de Rachel McAdams (brillante ailleurs), une erreur de casting qui aurait pu être évitée.
Et finalement, c’est aussi l’amour que Wenders ressent toujours pour l’Amérique et ses mythes, ses croyances, ses légendes occultes. Et cela même si la majeure partie du film se passe ici, en territoire québécois. Le titre français, Un meilleur temps viendra, ressemble à une promesse, une initiative que nous souhaitons se réalisera.
Genre : DRAME PSYCHOLOGIQUE – Origine : Allemagne / Canada / France / Suède – Année : 2015 – Durée : 1 h 59 – Réal. : Wim Wenders – Int. : James Franco, Rachel McAdams, Charlotte Gainsbourg, Marie-Josée Croze, Patrick Bauchau, Robert Naylor – Dist. / Contact : Métropole.
Horaires : @ Cineplex
CLASSEMENT
Tout public
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [ Entre-deux-cotes ] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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