16 juin 2016
RÉSUMÉ SUCCINCT
Six hommes se retrouvent bloqués sur un luxueux yacht de la mer Égée suite à une avarie mécanique. Ils commencent à se disputer pour savoir qui est le meilleur d’entre eux.
La trace de Yorgos Lanthimos, un des producteurs d’Attenberg, la fiction précédente d’Athina Rachel Tsangari, et auteur, entre autres, de Canine (Kynodontas, 2009) et du récent The Lobster (Le homard, toujours en salle) se fait sentir tout le long de Chevalier (2015) le nouveau film de la cinéaste grecque.
Délaissant, du moins temporairement, l’approche post-féministe d’Attenberg, elle jette cette fois-ci son regard sur le mâle grec d’aujourd’hui (pour ne pas dire le « mâle » tout court), pris entre une tradition patriarcale transmise de génération en génération et une nouvelle réalité, hybride, en quelque sorte dichotomique parce que ne sachant pas où se placer.
La fiction se base sur des propositions de jeux qui font éclater chez chacun de ces six hommes en position de huis clos dans un yacht, des vérités, des faiblesses, des erreurs, mais en même temps leur donnant la possibilité de montrer leurs faux courage, leur manque de discernement. Prenant une approche intentionnellement hétérosexuelle, Tsangari expose ces mâles du siècle à une époque où ils doivent redéfinir leur réalité physique et sociale. Bien que les rapports demeurent virils, il n’en demeure pas moins qu’une étrange sensualité émanent dans leur comportement, leurs face-à-face, leur ambiguïté face au sexe.
Tsangari demeure prudente, évitant le sensationnalisme démonstratif, s’en tenant aux étranges règles de ces jeux aussi étranges. Qui sera le gagnant de ces sortes de parties d’échecs où mêmes les perdants ont quelque chose à gagner.
Cours de thérapie, essai sur la crise des hommes (hétéro) d’aujourd’hui face à leurs rapports aux femmes, Chevalier, titre on ne peut plus multiforme, abrite d’intéressants portraits de mâles qui, en apparence, ont réussi sur le plan matérialiste, mais ont oublié leurs confrères des autres classes sociales.
Sur ce point, l’écriture de Tsangari se pare de mots et de phrases truculentes, mais également inquiétantes et totalement déconnectés de la réalité. Est-ce là, sa contribution artistique à la crise qui sévit dans son pays ? Un endroit sur terre qui semble avoir perdu ses repères à coups d’austérités et de fausses promesses.
Le nouveau cinéma grec ne peut être que politique, car la situation au pays devrait durer pendant encore longtemps. Mauvais présage qui, pour le cinéma, constitue néanmoins une mine d’or riche en sujets excitants. Tsangari n’a rien perdu du sens satirique de ses anciens maîtres de l’Antiquité. Leurs approches littéraires, elle les applique au cinéma avec un sens inné de la répartie et une verve impressionnante.
En somme, Chevalier est cruel, froid, distant, mais également drôle et truculent, exposant l’individu jusqu’à le rendre ridicule et en fin de compte, lorsque l’heure de finalement partir arrive, il rentre chez lui, emportant quelques leçons de comportement, espérant les appliquer. Et puis, ce sont les tabous des hommes qui sont exposés dans ce film brillant : impuissance sexuelle, peur de l’homosexualité ou encore refus de l’homosexualité latente, mais jamais exprimée.
Les chansons rétro de Françoise Hardy dans Attenberg cèdent leur place ici à Petula Clark, à du Tchaikovsky et à Minnie Ripperton. Avouons tout de go que malgré la crise ou sans doute grâce à la crise, le nouveau cinéma grec se dirige sans doute vers une reconnaissance mondiale, devenant comme ce fut le cas du cinéma asiatique et plus tard israélien, un cinéma sur qui il faudra désormais compter.
Genre : COMÉDIE SATIRIQUE – Origine : Grèce – Année : 2016 – Durée : 1 h 45 – Réal. : Athina Rachel Tsangari – Int. : Giannis Drakopoulos, Kostas Filippoglou, Yiorgos Kendros, Pano Koronis, Vangelis Mourikis, Nikos Orphanos – Dist. / Contact : EyeSteelFilm.
Horaires : @ Cinéma du Parc
CLASSEMENT
Non classé
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