1er septembre 2016
Amos Oz, probablement l’auteur israélien du 20e siècle le plus célèbre et le plus respecté. Pour son écriture, son dialogue avec la vie et avec les personnages qu’il décrit. Délicatesse, sens de l’observation, poésie littéraire, transcendance du quotidien et en fin de compte, un rapport lucide au monde, bien que teinté de mélancolie. Son autobiographie était-elle adaptable au cinéma ?
Actrice de renom, Natalie Portman signe un premier long métrage sur un sujet qui lui tenait à cœur : reproduire une partie de l’enfance d’Oz en images en mouvement. Pari presque tenu car il y a, dans A Tale of Love and Darkness, deux propositions qui se juxtaposent, espérant produire un ensemble cohérent. D’une part, la vision de Portman sur cette existence extraordinaire, célébrée à travers le monde. Comment être si proche du sujet et en même temps, conserver une attitude neutre, sans trop exposer. D’autant plus que la réalisatrice n’a que l’œuvre littéraire comme point d’ancrage. Née en 1981, elle n’a pas vécu cette époque. Les lieux, les personnages, les situations sont, dans son cas, des exemples purement fictionnels.
Sur ce point, le côté narratif fonctionne bien. Nous sommes les témoins d’un État qui s’annonce malgré les difficultés sociales et politiques qui se présentent. Justement, on aurait voulu en savoir plus sur ce point, question de remettre les pendules à l’heure. Portman jette alors son regard sur la mère de l’écrivain. Sensible, portant un amour inconditionnel à son enfant, se rappelant son enfance quelque part en Pologne, retrouvant dans la tourmente la terre de ses ancêtres, jetant un regard compatissant sur la population arabe, donnant un point de vue progressiste sur la question.
Et c’est là que le film de Portman affiche sa supériorité. Un premier essai de long métrage d’une rare délicatesse. Un film qui se perd intentionnellement dans l’abandon, et d’un coup s’attache à des détails qui traversent notre âme et questionne notre conscience.
Amos Oz, appuyé par sa femme, s’est laissé convraincre par Natalie Portman qui, de toute évidence, a délibérément opté pour éviter la langue d’Oz. Par respect, sans doute, par défi aussi, prouvant qu’en matière de scénarisation, elle pouvait se débrouiller, consciente que sa grande expérience en tant qu’actrice aura également servi d’école d’apprentissage au métier de réalisatrice et de scénariste. Et puis, de la fin du mandat britannique en Palestine, nous retenons une histoire terrible : deux peuples, autrefois frères (ou cousins) laissés à eux-mêmes, l’un jetant la faute sur l’autre. Jusqu’à aujourd’hui.
Soulignons également que Portman a bénéficié de la présence de très bons comédiens, dont le jeune Amir Tessler, d’une poignante ténacité, faisant face à la vie et aux situations avec une intelligence retenue. Sans aucun doute, ce qui fera de lui l’auteur qu’on connaît.
Et dans cette histoire fragile, les tourments de l’âme apparaissent comme des guides qui sauront bâtir une vie, quitte à ce que certains êtres chers finissent par se sacrifier.
Genre : DRAME – Origine : Israël – Année : 2015 – Durée : 1 h 38 – Réal. : Natalie Portman – Int. : Natalie Portman, Amir Tessler, Gilad Kahana, Makram Khoury, Shira Haas, Ohad Knoller – Dist. / Contact : Séville.
Horaires : @ Cineplex
CLASSEMENT
Interdit aux moins de 13 ans
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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