17 novembre 2016
Paul Verhoeven, 28 films à son actif, tous métrages et genres confondus, remarqué par la critique avec Le quatrième homme / De vierde man (1983), et par les cinéphiles invétérés, avec l’innovateurs Turkish Delights (1973) et le bouleversant Spetters (1980), demeure, à 78 ans, d’une jeunesse étonnante.
Une carrière dense dont certains films situent leurs intrigues dans l’univers du thriller, associé à un érotisme pénétrant où souvent, Éros, non seulement le dieu grec de l’Amour, mais aussi de la puissance créatrice, côtoie Sade, qui n’a nul besoin de présentation.
Cet argument s’applique à Elle, son tout dernier long métrage, un puzzle/thriller psychologique qui navigue dans des eaux troubles, film d’une incroyable modernité, assumant l’époque actuelle avec une frénésie sans pareille, élan qui s’empare de la principale protagoniste, électrifiante Isabelle Huppert, dans un de ses meilleurs rôles. Calme devant la tempête, irascible face aux événements, voyant en l’ennemi une possibilité de vivre le moment, jouant un jeu de face-à-face aussi manipulateur qu’insensé.
Elle, dans le contexte du film, c’est un pronom (im)personnel que le cinéaste refuse de définir. Oui, Elle a un nom, mais qu’importe. « Elle », c’est aussi une idée de la femme dans la société, la vision qu’elle se fait de la sexualité et de son intériorité, de sa liberté, de son rapport aux hommes. À l’heure où les femmes combattent un certain sexisme cyclique et tout particulièrement les actes d’agression de la part des hommes, Elle peut scandaliser, sans doute à juste titre, certains groupes réfractaires.
Mais il faut lire ce film entre les lignes, essayer de déceler ce qui se cache derrière chaque plan, chaque code narratif, le processus de création d’un cinéaste soucieux de son autonomie. D’une simplicité presque gênante, le récit regorge de multiples zones grises qui, d’emblée, ne peuvent rien signifier, mais dont la finale, puissante, soumet le spectateur, qu’il soit homme ou femme, à une analyse profonde de son psyché et de sa perception sur la théorie de genre.
Jamais Verhoeven n’aura été aussi proche que Le quatrième homme, suscitant la controverse, étalant des idées marginales contestées et ô combien fulgurantes sur nos fantasmes intérieurs et notre désir d’interdits. Presque octogénaire, il demeure une source d’inspiration pour les cinéastes de sa génération, prouvant que le cinéma est un art en constante évolution et quel que soit l’âge atteint, il faut s’y adapter.
Elle est sur le chemin des Oscars 2017 pour représenter la France dans la catégorie «Meilleur film étranger ». Les juges seront-ils assez impartiaux et ouverts d’esprit pour lui décerner cette récompense
Genre : SUSPENSE PSYCHOLOGIQUE – Origine : France / Allemagne – Année : 2016 – Durée : 2 h 11 – Réal. : Paul Verhoeven – Int. : Isabelle Huppert, Laurent Lafitte, Anne Consigny, Charles Berling, Virginie Efira, Christian Berkel – Dist./Contact : Métropole.
Horaires : @ Cinéma Beaubien – Cineplex
CLASSEMENT
Interdit aux moins de 16 ans
(Violence / Érotisme)
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
2024 © SÉQUENCES - La revue de cinéma - Tous droits réservés.