En salle

Happy End

18 janvier 2018

Semaine du 19 au 25 janvier 2018

RÉSUMÉ SUCCINCT
À la tête d’une entreprise familiale de travaux publics, Anne Laurent essaie d’atténuer l’impact financier d’un accident survenu sur un chantier de construction. Thomas, son frère, traverse une période difficile après la tentative de suicide de sa fille adolescente. Quant au père, un homme âgé de 85 ans, il ne cache pas ses intentions de mettre fin à ses jours.

COUP DE CŒUR
| PRIMEUR |

★★★★

CRISES ET CHUCHOTEMENTS

_ ÉLIE CASTIEL

Toujours aussi acerbe et indicible dans son illustration de la violence, de l’indifférence, de l’emprisonnement émotionnel et affectif, Michael Haneke persiste à signer un cinéma de la modernité, s’en fichant des nouvelles tendances d’aujourd’hui, quitte à s’attirer la foudre de certains de ses détracteurs, autrefois fidèles adhérents de son cinéma.

Et peut-être bien que Le ruban blanc (2009) et Amour (2012), ses deux Palmes d’or, tiraient en quelque sorte la sonnette d’alarme. Et puis, Happy End, qui témoigne que le cinéaste demeure toujours aussi contemporain, alliant puzzle esthétique et examen de conscience postfreudien à échelle humaine. La mise en scène illustre parfaitement bien cet état des lieux d’une société bourgeoise indifférente aux parcours sociaux et politiques actuels. Les scènes, particulièrement intérieures, à huis clos psychanalytique, se présentent comme une visite guidée dans l’antre fermé d’une classe sociale dysfonctionnelle; et pour Haneke, pas vraiment si éloigné de la nôtre. Comme cette relation épistolaire par courriel où les nouvelles tendances sexuelles se juxtaposent ou peut-être mieux se justifient par de fausses déclarations d’amour; sans oublier ces accomodements déraisonnables que manifestent les protagonistes d’un nouveau siècle indéfini. La communauté humaine actuelle aurait-elle créé de nouveaux codes relatifs à la tendresse, la possession et les rapports amoureux et familiaux?

[Le film] souligne avec un sens de l’abstraction tout le côté
tragique et mythique d’un cinéaste austère, il est vrai,
mais qui se penche sans cesse sur la condition
humaine en parcourant ses profonds souterrains.

C’est d’autant plus enrichissant que ce drame existentiellement cupide et féroce évoque d’une certaine façon l’architecture antonienne glaciale, impersonnelle, et dans le cas présent outrageusement intensifiée par la couleur, étrangement plus agressive que le noir et blanc du maître italien. Mais il y aussi du Luis Buñuel dans Happy End, titre à double sens, mais sans cet humour cyniquement pince-sans rire du cinéaste ibérique. Haneke opte pour la dérision, la malice, une ironie presque maladive qui hante les personnages, sauf peut-être dans le cas de la petite Ève qui, malgré sa liberté pubère, rate son suicide et permet au cinéaste une finale anthologique. C’est un point culminant qui souligne avec un sens de l’abstraction tout le côté tragique et mythique d’un cinéaste austère, il est vrai, mais qui se penche sans cesse sur la condition humaine en parcourant ses profonds souterrains.

Sortie : vendredi 19 janvier
V.o. : anglais, français; s.-t.f.

Réalisation
Michael Haneke

Genre
Drame

Origine : France, Autriche, Allemagne – Année : 2017 – Durée : 1 h 48 – Dist. : Métropole Films.

Horaires&plus
@ Cinéma BeaubienCineplex

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – Les cotes reflètent uniquement l’avis des signataires.

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