22 mars 2018
RÉSUMÉ SUCCINCT
Vitka, un orphelin de 27 ans, caresse le rêve de quitter sa famille pour retrouver la liberté. Mais il fait la rencontre de son père, un criminel. Cette découverte le pousse à prendre une décision.
L’étrange lumière timidement diaphane utilisée dans le premier long métrage du très prometteur Alexander Hant octroie au film une atmosphère de tension admirablement puérile et de volupté viscérale. Car How Viktor… est une incursion dans une Russie prise entre une occidentalisation mal assumée et un territoire à cheval entre l’Asie du Nord et l’Europe, un peu comme la Grèce qui, culturellement, navigue aussi dans des zones d’ombre. Et tant mieux, car cette particularité permet aux deux pays, en plus de leur dénominateur commun qui est l’orthodoxie, de renouer avec ce qu’il y a de mieux dans leur culture. Mais la Russie de Viktor, le « Garlic », un souffre-douleur qui s’ignore (ou presque), est un endroit où le communisme a laissé la place à un capitalisme sauvage que peu de citoyens peuvent se permettre de rêver et encore moins de réaliser. Combines, manipulations, mensonges, misogynie, homophobie (si l’on s’affiche trop) et autres machinations considérées comme maux par l’Occident.
Nul doute que des mouvements à la #metoo n’auraient aucune chance dans ce pays ayant conservé une tradition morale et sexuelle d’une autre époque. Mais chez les personnages, une tendresse, une humanité cachée, une liberté sexuelle (notamment chez le femmes) qui, chez les hommes, se complaît souvent en actes de violence, de règlements de compte et de fierté machiste. C’est ce qui permet à How Viktor… de confirmer qu’il s’agit d’un premier film qui se distingue par sa sincérité, son désir de cinéma, son amour des comédiens, mais surtout et avant tout, de son partage d’une vision du monde et de l’individu.
Et puis, on se prend d’affection pour le jeune Evgueni Tkatchuk, impérial, attirant, farouchement photogénique, dialoguant avec la caméra de Daniil Fomichev avec un naturel des plus complices. Et comme tout film russe qui se respecte, un message en filigrane, art perdu dans le cinéma occidental : que le dialogue, la communication, le respect de soi et de l’autre et le refus d’égocentrisme peuvent arranger les choses. Dans un climat de tension entre un Occident en mode « guerre froide » et une Russie « simple spectatrice », le cinéma, semble dire Hant, peut se permettre d’être le porte-parole d’une possible entente, pour ne pas dire détente.
Vu sous cet angle, How Viktor « The Garlic » Took Alexey « The Stud » to the Nursing Home, au titre d’autant plus adorable et à sens multiples, est un film politique. Car Hant se présente à nu, comme un être libre, fidèle à son processus de création, inspiré par ses tripes, entrailles en pleine ébullition ; et plus que tout, prenant le cinéma comme un mécanisme d’engagement social et personnel.
Réalisation
Alexander Hant
Genre : Comédie dramatique – Origine : Russie – Année : 2017 – Durée : 1 h 30 – Dist. : KinoFilm Corp.
Horaires & info.
@ Cineplex
Classement
Tout public
(Déconseillé aux jeunes enfants)
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes]
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