5 novembre 2011
>>> Luc Chaput
La première édition du festival de films francophones avec sous-titres anglais eut lieu à Montréal, à l’initiative de Maidy Teitelbaum, à l’époque du référendum de 1995. Au cours des années, la qualité moyenne des films présentés s’améliora et la fréquentation aussi, ce qui amena la direction à passer d’une salle du Musée des Beaux-Arts au très beau et grand Cinéma Impérial, rue Bleury.
Comme dans beaucoup de festivals, l’éventail de la programmation de cette année est assez large, allant du film policier nerveux La Proie d’Éric Valente à la comédie romantique pour adolescents J’aime regarder les filles de Frédéric Louf où l’élection de Mitterand en 1981 sert de toile de fond à la rencontre entre deux jeunes de classes sociales opposées, ce qui rajoute une incidence dramatique à l’intrigue inspirée par certains aspects de l’œuvre de Musset.
Pierre Shoeller, dans Versailles présenté en 2008, opposait les dorures du château emblématique de la royauté française à la vie d’un sdf dans les bois près des résidences bourgeoises. L’Exercice de l’état est un très grand film politique où le scénario met en jeu les efforts de privatisation de certains gouvernements et la résistance que cela suscite à la fois dans les milieux syndicaux et dans les plus hautes sphères de l’administration. Les protagonistes, le ministre (Olivier Gourmet) et son principal conseiller (Michel Blanc), constituent un couple étonnant qui montre bien la fuite en avant de certains personnages publics pendant que d’autres se battent pour que le service public reste digne de ses missions et en aie les moyens. La mise en scène ample et juste de Shoeller fait naviguer le spectateur à travers une intrigue complexe aux retournements nombreux et quelquefois étonnants.
Maïwenn, dans Polisse, nous montre le dévouement des officiers de la brigade de la Protection des mineurs dans la capitale. Comme dans L. 627 de Bertrand Tavernier auquel le film ressemble par certains côtés stylistiques, on est frappé par le manque de moyens de ces hommes et femmes qui ont affaire à chaque jour à des situations révoltantes auxquelles ils ne peuvent toujours répondre aussi bien qu’ils le voudraient. Les discussions entre collègues et leurs vies familiales servent donc aussi de soupape de sûreté à ces fonctionnaires de police interprétés avec intensité par un groupe de comédiens qui sont amenés par la réalisatrice vers un même objectif.
Jean-Pierre Darroussin interprète dans Le Havre un commissaire de police qui pourrait être en désaccord avec les draconiennes politiques actuelles de l’immigration en France. La mise en scène du finlandais Aki Kaurismaki, flirte avec les codes du muet tout en rendant un discret hommage à certains classiques tournés dans ce grand port de Normandie et redonne aussi le sens de refuge à son nom.
Ce film réalisé en français, comme naguère La Vie de bohème en 1992, représentera la Finlande dans la course pour l’Oscar du film en langue étrangère. Cela montre bien l’étendue de la francophonie dans ce festival. Un seul bémol pourtant doit être signalé. Les langues étrangères (espagnol ou autre) sont traduites en des sous-titres anglas ce qui frustre assurément les spectateurs unilingues francophones.
Séquences reviendra sur le site ou dans la revue sur d’autres films lors de leur sortie en salle.
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