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Les écarts de conduite de la VPF

9 mars 2012

ÊTRE … OU DISPARAÎTRE

>>  Élie Castiel

Cette semaine, le Regroupement des distributeurs indépendants de films du Québec1 nous a fait parvenir un communiqué se rapportant au passage des salles de cinéma au support numérique, au mode de financement des équipements appropriés et aux conséquences que ce phénomène impose sur l’avenir du cinéma et des distributeurs.

Avec l’appui d’un intégrateur ayant pour tâche de collecter les frais de copies virtuelles (VPF : Virtual Print Fee) de la part de tous les distributeurs qui le désirent, plusieurs exploitants de salles du Québec font financer leur équipement numérique. Les VPF servent à rembourser l’investissement des équipements. Par conquéquent, l’exploitant cède à l’intégrateur le droit d’autoriser un distributeur à présenter un film sur grand écran.

Mais là où le bât blesse, c’est dans les coûts prohibitifs2 qu’exigent ces compagnies d’intégrateurs, toutes américaines, sans lien aucun avec le Québec. Dans le cas d’un exploitant comme Cineplex-Divertissement, la question ne se pose pas, puisque la compagnie a créé son propre intégrateur canadien avec la collaboration de Empire Theatres, autre chaîne d’exploitation.

Le regroupement des indépendants s’inquiète sur le fait qu’en raison de cette situation,  la décision finale de la programmation des salles de cinéma au Québec soit prise par des compagnies étrangères. Cette mainmise rapide et graduelle contribue amplement à fermer les régions du Québec au cinéma d’auteur car à mesure que la numérisation des salles se confirme, le danger s’amplifie. Sans oublier de souligner que « tout retard de paiement des VDP interdit aux distributeurs de rejouer un film dans la même salle ».

Devant la perte de contrôle sur sa programmation, l’exploitant n’est plus en mesure d’offrir au public une gamme de films importants. Par ailleurs, les intégrateurs exigent que les exploitants cessent de présenter des films en support 35 mm et en Blu-ray/DVD, ce qui a pour but bien précis d’accroître leurs rendements en paiements VPF. Sans cette condition, ils ne consentent pas au financement du nouveau support numérique.

Le RDIFQ demande donc a Gouvernement du Québec de créer un Intégrateur québécois économiquement abordable et qui pourrait être géré par la Régie du cinéma, déjà responsable, entre autres, des visas d’exploitation.

Nous appuyons sans retenue les demandes des membres du regroupement : tout d’abord parce que depuis toujours, ces indépendants ont essentiellement distribué des films d’auteur, le plus souvent noyés par les produits américains; mais aussi parce que la distribution de films ne peut se limiter aux quelques maisons qui peuvent se permettrent une telle aventure financière; parce que Montréal ne peut se contenter d’être le seul pôle d’attraction pour ce genre de cinéma; et aussi et avant tout parce que nous ne pouvons pas nous autoriser à voir disparaître de nos écrans un cinéma qui ose constamment remettre en question l’aventure du regard.

1 Le regroupement comprend : A-Z Films Inc., Axia Films Distribution, Domino Films, Evokative Films, Filmoption International, FunFilm Distribution, K-Films Amérique, Les Films du 3 mars et Locomotion Distribution.

2 En ce moment, la taxe des VPF est de 950 $ u.s. par film et par salle, sans compter sur les frais de virement à l’étranger.

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