13 octobre 2012
>> Élie Castiel
À partir d’un conte japonais datant du Xe siècle, le célèbre chorégraphe européen Jiří Kylián déconstruit le mythe folklorique et le place dans l’espace de la modernité par le biais de la danse. Œuvre difficile, pour certains dépaysante, Kaguyahime – Princesse de la lune possède un côté troublant qui se manifeste notamment dans la première partie, la plus longue, situant les trois actes (« la Descente » de la belle princesse à partir de la lune, venant rejoindre les humains, les « Célébrations » entourant sa présence sur terre et « la Bataille » indiquant que sa beauté idéale est source de conflits) dans un contexte où l’art de la représentation artistique n’a plus de limites. Tous ces segments chorégraphiques déconstruisent le récit, s’offrent un décor de rêve, entre le technologique inspiré et le spectaculaire et bénéficient d’une orchestration minimaliste où l’Est et l’Ouest se joignent avec prudence et selon les circonstances, engouement.
Mais l’aspect répétitif de ces notes musicales, particulièrement celles du japonais Maki Ishii, qui fusionne traditions asiatiques et tendances occidentales acquises à l’Académie de musique de Berlin, paraît étrange pour les non initiés, les plaçant dans une situation presque d’inconfort. La flûte de bambou et le daiko (énorme tambour à peau) s’unissent pour former un tout d’une cohérence, certes totale, mais bizarre, d’une viscéralité à fleur de peau qui finit par lasser.
La deuxième partie, plus légère, remet les choses à leur place. Les quatre segments, « la Guerre », « Mikado », « l’Arrivée de l’armée » et « l’Ascension de Kaguyahime », alors que Kaguyahime refuse les princes prétendants et retourne dans son univers lunaire, unifient le tout, assurent une certaine harmonie et brillent par leur complexité.
En attendant l’inépuisable et populaire Casse-Noisette (en décembre) et le tant anticipé La Lanterne rouge de nul autre que Zhang Yimou, le célèbre réalisateur chinois, Les Grands Ballets Canadiens débutent leur saison en obligeant les spectacteurs à être complices. Beau travail !
ESSAI CHORÉGRAPHIQUE | Chorégraphie : Jiří Kylián | Musique : Maki Ishii – Chef d’orchestre : Michael de Roo, dirigeant les percusionnistes de l’Orchestre des Grands Ballets Canadiens, le Kodo et l’Ensemble Gagaku– Décors / Éclairages : Michael Simon – Costumes : Férial Simon, Joke Visser – Danseurs : Corps de ballet des Grands Ballets Canadiens | Durée : 1 h 25 (avec 1 entracte) | Prochaines représentations : Jusqu’au 27 octobre 2012 – Salle Wilfrid-Pelletier (Place des Arts).
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