4 novembre 2012
>> Élie Castiel
Tenue du 25 octobre au 3 novembre 2012, la 4e édition du cinéma grec de Montréal confirme une fois de plus que l’événement cherche encore sa voie, ce qui en soi n’est pas une mauvaise chose. Au contraire, il y a là, de la part de la fondatrice, Avra Georgiou, une volonté concrète, un désir sans limites et, compte tenu de la situation économique, sociale et surtout politique que traverse la Grèce en ce moment, un courage indéniablement contagieux.
Ce mélange de films d’autres décennies et de nouvelles propositions est une bonne idée, du moment où il existe un équilibre sain. Cette année, l’hommage à trois icônes féminines grecques qui, chacune à sa façon, trace un portrait élégiaque et envoûtant de la grécité, demeure un excellent choix. Dans Électre (Ilektra) de Michael Cacoyannis, Irène Papas se surpasse, confirmant son statut de grande tragédienne. La fugue et l’énergie de Melina Mercouri s’étalent avec une rebellion à la fois farouche et surprenante dans Stella, femme libre (Stella), également de Cacoyannis. Quant à Maria Callas, son seul passage à l’écran côté-fiction se fait sous la gouverne de Pier Paolo Pasolini qui, avec Medea, atteste une fois de plus sa victoire de la poésie contre le banal du quotidien. Et Callas demeure superbe, évitant à chaque séquence de se laisser emporter par l’opéra du même titre, un de ses plus beaux moments sur scène. Une rencontre sublime entre deux géants.
Tiré de la télésérie Meeting with Remarkable Men (Synantiseis me tous axiosimeiotous anthropous), Cinéastes est une source d’inspiration pour les cinéphiles. On peut ne pas être tout à fait d’accord avec certains propos émis par le multidisciplinaire Pierre Rissient quant à l’état de la planète cinéma, mais n’empêche que Menelaos Karamaghiolis propose une magnifique incursion dans l’univers des images en mouvement. Le même jeune cinéaste nous confirme son talent dans J.A.C.E. (Just+Another-Confused=Elephant), film au titre mathématique qui s’harmonise parfaitement avec la mise en scène, faite de morceaux épars, de propositions dispersées, de moments forts dans la direction d’acteurs, alliant différents genres cinématographiques avec grâce et, intentionnellement, de façon alambiquée. Karamaghiolois cherche encore son chemin, mais il n’est pas loin de l’avoir trouvé, inscrivant le nouveau cinéma grec dans une mouvance à la fois européenne et universaliste.
Côté nouveaux films, Christmas Tango (To tango ton Hristouyennon) de Nikos Kouteladakis aborde, entre autres, délicatement et avec sensibilité, le thème de l’homosexualité masculine, rarement suggérée dans le cinéma grec grand public. Et Dos de Stathis Athanasiou est une sensuelle rencontre amoureuse entre deux sensibilités, l’espagnole et la grecque, magnifiquement mises en images par Yannis Drakoularakos.
La séance consacrée aux courts métrages grecs des cinéastes de la diaspora démontrent qu’il existe une relève, parfois hésitante, survoltée, multiple, mais manifestant d’intéressants signes créatifs. Mais ce qui étonne le plus chez tous ces jeunes réalisateurs, c’est cette volonté d’aller vers l’ailleurs, vers l’autre, plaçant l’invidu grec dans des sphères globalisantes qu’il essaie d’intégrer à son idiosyncrasie hellénique.
L’an prochain, l’événement entame sa 5e année et se promet d’être plus exigeant, tout en respectant l’adéquation grand-public/nouveaux regards. Mais il est primordial qu’à l’instar, par exemple, des festivals latino-américains ou autres, le Festival du cinéma grec de Montréal atteigne un plus large public local, question d’assurer sa survie.
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