5 mai 2013
>> Élie Castiel
De retour de Nashville, Carmen est accueillie avec liesse par ses admirateurs qui forment, entre autres, la faune bigarrée de la Main (Montréa l) : prostituées, travestis, drag queens. Mais il y aussi Maurice, son amant, Bec-de-Lièvre, son habilleuse, Gloria, la chanteuse sud-américaine et, surtout, Tooth Pick, l’homme de main de Maurice et qui éprouve pour Carmen une profonde haine. Et ce soir-là, Carmen doit chanter au célèbre cabaret, le Rodéo.
Des mots, des gestes, des intonations, des comportements, une façon d’être. Un univers à part, presque en huis clos. Celui de la Main, un espace créé par la plume extrovertie de Michel Tremblay, celui par qui l’âme d’un peuple en quête d’identité crie pour sa survie. Et puis René Richard Cyr, celui par qui la douce et tendre folie se concrétise. Il s’empare de Sainte Carmen de la Main, pièce illustre de Tremblay pour lui offrir une ode à la fois libre et majestueuse, simplement en lui attribuant un mot qui en dit tout, chant. Car Le Chant de Sainte Carmen de la Main, c’est aussi revivre un moment de théâtre, remplacer la carte de la nostalgie par la relecture d’un classique incontournable, une façon comme une autre de débattre avec l’histoire culturelle.
La mise en scène de Cyr enveloppe l’espace, le parcourt comme s’il s’agissait d’un geste simple du quotidien. Elle est impulsive, survoltée. Les décors de Pierre-Étienne Locas privilégient l’aspect vierge, sans fioritures. Seuls comptent les personnages, leur dévotion pour Carmen, leur grain de folie, leurs états d’âme. Et quelques face-à-face, entre Carmen et Maurice surtout. Maude Guérin, impériale ; Normand D’Amour, énergique, puissant ; et les autres, tous investis dans un labeur d’amour qui a pour nom, plaisir de jouer.
Mais Le Chant de Sainte Carmen de la Main, c’est aussi un spectacle musical servi remarquablement par la musique de Daniel Bélanger. Des chansons parfois grivoises, certaines tragiques, des airs inoubliables : Le soleil, c’est Carmen, La Dignité, Buenas noches, mi coraçon, ou bien encore L’orage et L’éclaircie. Et une surprise de taille, une France Castel à la voix superbe, poignante, plaçant les spectateurs dans des sphères d’émotion insoupçonnées.
Avec Le Chant de Sainte Carmen de la Main, l’esprit d’équipe est total, le travail collectif exemplaire. Nul doute qu’avec ce spectacle à la fois populaire et sophistiqué, le TNM clôture la saison 2012-2013 de façon inoubliable. Carmen finit par y laisser sa peau, mais sa résurrection demeure pour l’éternité. ( ★★★★ )
DRAME MUSICAL | Auteur : René Richard Cyr – Adaptation : René Richard Cyr, d’après Sainte Carmen de la Main de Michel Tremblay – Mise en scène : René-Richard Cyr – Décors / Accessoires : Pierre-Étienne Locas – Musique : Daniel Bélanger – Éclairages : Étienne Boucher – Costumes : Mérédithe Caron – Comédiens : Maude Guérin (Carmen), Normand D’Amour (Maurice) Éveline Gélinas (Bec-de-Lièvre), France Castel (Gloria), Benoît McGinnis (Tooth Pick) | Durée : 1 h 30 (sans entracte) – Représentations : Jusqu’au 22 juin 2013 – TNM .
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Remarquable. ★★★ Très bon. ★★ Bon. ★ Moyen. ☆ Mauvais. ☆☆ Nul … et aussi 1/2 — LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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