21 juin 2013
Résumé
Odessa, au crépuscule de l’Empire russe, plus précisément à Moldavanka, un quartier juif de la ville. Benya Krik est le « roi » de cette petite communauté qui abrite des personnages colorés, dignes, et tenant à conserver leurs traditions. Mais Benya est, par choix, un anti-héros qui trafique dans des affaires douteuses mettant les siens en péril.
En quelques mots
★★★ 1/2
L’originalité du texte de l’écrivain juif russe Isaak Babel (1894-1940) est avant tout un récit d’émancipation, d’ouverture à une société fondée sur le pouvoir économique. Que sont après tout ces histoires de contrebandiers, de revendeurs de tout acabit et de gangsters notoires au cœur tendre si ce n’est la représentation d’une société qui se modernise au son de la corruption, de l’égocentrisme, mais aussi de la survie. Pour la communauté juive de cette bourgade d’Odessa, un pas en avant dans la société civile majoritaire. Une façon comme une autre de participer au régime social, quelles que soient les conséquences. Mais pour une grande partie du répertoire théâtral yiddish, c’est dans l’espoir, la joie de vivre, la prise en charge d’une réalité de l’existence et la rédemption que se situe cette façon de voir la vie.
Avec Tales from Odessa, la comédie musicale prend son ampleur et toute sa signification comme art de la représentation de l’esprit humain. Chansons et chorégraphies se mêlent à la tradition orale avec une grâce chatoyante et une énergie farouche. Le yiddish n’est plus une langue insulaire et particulière, mais devient, l’espace de quelques moments, idiome universel qui plonge le spectateur, qu’importe ses origines, dans une remise en question de ses propres aspirations et fantasmes.
Mais ce qui surprend le plus au Segal, c’est ce que les différents metteurs en scène arrivent à faire avec un espace scénique restreint. Ici, celui manipulé par Audrey Finkelstein brille par la simplicité du décor et se conjuge allègrement aux éléments humains, les plus important en ce qui nous concerne. À la coordination du casting, accueillant harmonieusement des comédiens de tout horizon, Rachelle Glait a fait un travail digne de mention. Pour certains, Tales from Odessa est leur première incursion dans l’univers yiddish.
Reste cependant que le plus important demeure le message social empreint de dignité humaine. Il y a là un portrait documentaire sur une identité juive pas loin de l’Holocauste qui devait changer à jamais son idiosyncrasie, et comme dans le genre humain, pour le meilleur et pour le pire.
Soulignons la présence à la production du célèbre Josh Dolgin (alias « Socalled »), créateur du Klezmer hip-hop et responsable ici de ces magnifiques paroles et de la musique envoûtante à laquelle se mêle avec inspiration et dextérité le théâtre d’ombres superbement mis en contexte par Clea Minaker, évocant avec infinie tendresse le célèbre Karaghiósis grec. >> Élie Castiel
COMÉDIE MUSICALE | Auteur : Isaak Babel – Mise en scène : Audrey Finkelstein – Livret : Derek Goldman – Décors : John C. Dinning – Éclairages : Nicolas Descôteaux – Costumes : Monika Héredi – Musique : Geof Holbrook, Conor Brown (et al.) – Chorégraphie : Sasha Kleinplatz, Andrew Tay – Théâtre d’ombre : Clea Minaker – Coordination au casting : Rachelle Glait – Comédiens (par odre alphabétique) : David Anidjar, Mark Bassel, Avu Bendahan, Leslie Bronstein, Heath Caplap, Celina Clark , Gab Desmond, Jonathan Eidelman (et al.) | Durée : 1 h 15 (sans entracte) – Représentations : Jusqu’au 7 juillet 2013 – Centre Segal .
COTE
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Remarquable. ★★★ Très bon. ★★ Bon. ★ Moyen. ☆ Mauvais. ☆☆ Nul … et aussi 1/2 — LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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