11 octobre 2013
Le retour en force de la 3D ou stéréoscopie a surtout servi des immenses productions à caractère hollywoodien ou à redonner une nouvelle vie en retravaillant dans ce médium des classiques qui n’avaient pas nécessairement besoin de ce « lifting ». Dans le programme Fantasmagories 3D présenté à deux reprises au FNC à Montréal, l’ONF et d’autres maisons de production ont donné la possibilité à certains de leurs artistes d’employer ce médium et le résultat témoigne de nouvelles possibilités
Parmi les œuvres présentées, deux gagnants du dernier festival d’Annecy Subconscious Password de Chris Landreth et Gloria Victoria de Theodore Ushev. Chris Landreth reprend en la magnifiant l’idée porteuse de son Ryan qui lui valut un Oscar : À partir d’une rencontre où il ne souvient pas du prénom de l’interlocuteur, son cerveau lui joue un tour et l’emmène dans un jeu télévisé parodie déjantée de Password où des synapses se forment, se déforment et se conforment pour retrouver dans ce dédale le fameux prénom très usuel tant recherché. La stéréoscopie sert le propos car certains personnages deviennent des diables à ressort surgissant de diverses manières dans le cours de l’action. La production emploie plusieurs types d’images et d’animations pour rendre crédibles ces images mentales qui ne durent que des millisecondes et que Landreth par son art rend visibles. Password a gagné le grand prix du court à Annecy.
Theodore Ushev, quant à lui nous livre le troisième volet de sa trilogie sur l’art au XXe siècle. Après Tower Baher et Drux Flux, Gloria Victoria remet à la mémoire des images venant du vorticisme, du surréalisme et du cubisme. Le caractère militaire de la symphonie Léningrad de Shostakovich sert de magnifique support cinético-musical à ce tourbillon d’images connues ou plus rares que le réalisateur triture, répète, avance et recule et transforme donc dans un ballet abstrait puis plus réaliste dans un cadre auquel la stéréoscopie rajoute un surplus de sens. Pour ce magistral cours d’histoire de l’art, Ushev a reçu le prix de la Fipresci à ce même festival.
Parmi les six autres courts présentés, signalons Souviens-moi de la Française Joséphine Derobe où la caméra 3D permet de faire partie d’une nature très fournie dans un parc d’une villa de la banlieue parisienne là où un homme, à la suite de la mort d’un parent, retourne et retrouve des bribes puis des moments de son heureuse enfance . >> Luc Chaput
Le jour nous écoute est présenté par ailleurs les 11 et 17 octobre, dans le cadre de la compétition FOCUS. La fragilité de l’instant s’anime devant nous grâce à Félix Dufour-Laperrière qui nous étonne une fois de plus avec ce film d’animation, produit à l’ONF par Julie Roy d’après une idée de Bernard Émond, et qui utilise plusieurs des palettes techniques disponibles pour exprimer son art. L’emploi de dessins au crayon apporte fragilité et poésie tandis que leur jumelage avec des mosaïques défilantes de photographies urbaines donne au film une nervosité seyant à son environnement urbain. À l’aide des mots de la poétesse québécoise Hélène Dorion, le film illustre l’empreinte indélébile que laisse la lecture dans la vie quotidienne d’un couple citadin. Les mots de l’auteure, dits tour à tour par les deux protagonistes, évoquent également la prégnance de l’art sur notre propre temporalité. Dans ce film beau et audacieux, les images et les mots finissent par ne faire qu’un et nous donnent à voir et à écouter un moment tout en subtilité et en finesse. >> Charles-Henri Ramond
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