8 novembre 2013
Résumé
Estela, 12 ans, habite avec son frère Heli, marié et père d’un jeune enfant. La jeune fille est amoureuse de Beto, 17 ans. Ils souhaitent se marier et même s’enfuir pour échapper et avoir un meilleur avenir ailleurs. Mais un jour Beto vole quelques paquets remplis de drogue et les cache chez Heli. Les conséquences seront désastreuses pour ce dernier.
En quelques mots
★★★★
Au même titre que Carlos Reygadas, d’ailleurs coproducteur du film, Amat Escalante se classe parmi les cinéastes mexicains les plus imaginatifs et originaux des quelques dernières années. Prix de la mise en scène au dernier Festival de Cannes et Louve d’Or au récent Festival du nouveau cinéma, nous sommes confiants que les récompenses sont dues non seulement à la maîtrise de la mise en scène, éclatée, sans compromis, farouchement libre, mais également au radicalisme parfois extrême (et tant mieux !) du réalisateur, montrant la violence dans un milieu criminel comme affaire du quotidien, perméable, fatale bien entendu, presque comme un terrible sort jeté sur l’humanité. Et c’est dans un Mexique sans loi que les personnages se démènent du mieux qu’ils peuvent pour avancer vers un meilleur futur, de plus en plus lointain. La passivité de l’État est montré en sourdine, comme si tout acte d’agression était chose courante, permise, officieusement légalisé. Entre la police et les mécréants, une complicité étrange que Escalante montre avec une rigueur exemplaire, sans jugement, allant droit aux faits.
Nous n’avons pas eu l’opportunité de voir Sangre (2005) et Los Bastardos (2008) les deux premiers films du cinéaste dont les critiques du monde entier saluaient son originalité , voyant là la naissance d’un grand metteur en scène. Avec Heli, nous en avons le cœur net. Film sans pathos, au contraire il y a une froideur qui enveloppe le tout, une distanciation bienvenue qui nous imprègne et qui rend la dramaturgie encore plus réelle. Il s’agit en fait d’un film poétiquement chorégraphié grâce à la lumière et les mouvements de caméra, à la fois violents et saccadés d’un Lorenzo Hagerman inspiré, venu, entre autres, du documentaire et prodiguant à l’espace une sorte de gestuelle surréelle, encombrante et ouverte à la fois, agressive et sereine.
Évocant l’univers de Buñuel, notamment celui du remarquable Los Olvidados (1950), non pas par le sujet, mais par la démarche quant à la peinture d’un certain pan de la société, Heli et un état des lieux d’une société axée sur le crime et dans le même temps la radioscopie impartialement clinique d’une certaine forme de violence. Les thèmes du couple, de la famille, de la fraternité, de la lutte pour la survie, de la rédemption et de l’incontournable roue de la fatalité sont traités avec une justesse de ton et une connaissance freudienne du comportement paradoxal de l’individu. Le temps et l’espace ne sont plus des entités inséparables, mais sources de toutes les contaminations de l’homme, que l’on soit victime ou tortionnaire, comme si sa présence sur terre ne tenait qu’à un fil. Inoubliable, terrible et profondément humain. À voir sans faute, ne serait-ce que pour cette chanson qui traverse le film et qui nous chavire l’âme pour la transformer en un bel et inoubliable écrin d’amour. >> Élie Castiel
DRAME | Origine : Mexique / France / Allemagne / Hollande – Année : 2013 – Durée : 1 h 45 – Réal. : Amat Escalante – Int. : Armando Espitia, Andrea Vergara, Linda González, Juan Eduardo Palacios, Ramón Álvarez – Dist. / Contact : K-Films Amérique | Horaires / Versions / Classement : Excentris
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Remarquable. ★★★ Très bon. ★★ Bon. ★ Moyen. ☆ Mauvais. ☆☆ Nul … et aussi 1/2 — LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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