6 novembre 2014
Texte : Luc Chaput
Au XVIe siècle, dans la France des guerres de religion, un comte protestant, devient par amitié pour la famille, le précepteur d’une aristocrate catholique mariée récemment contre son gré. Dans cette Princesse de Montpensier, adaptation pleine de bruit et de fureur de l’écrit éponyme de Madame de Lafayette par Bertrand Tavernier bien meilleure que l’accueil qui lui fut réservée lors de sa sortie, Lambert Wilson incarne avec une brillante retenue l‘idéal à la Montaigne d’intelligente émotion face à ces dérèglements des sens et des armes au nom de la religion triomphante quelle qu’elle soit. Son personnage du comte de Chabannes ancre ainsi pour le spectateur avisé un lieu où son regard peut se porter dans ce maelstrom.
Lambert est le fils de l’acteur français Georges Wilson, compagnon puis héritier de Jean Vilar au Théâtre National populaire et interprète dans Une aussi longue absence d’Henri Colpi, gagnant de la Palme d’or à Cannes. Il décide pourtant de suivre les cours à une académie londonienne de théâtre où il confirme ses talents en chant et en art dramatique et une facilité à jouer dans ces deux langues. Il construit donc sa carrière loin de son père qui préfère les mises en scène théâtrales amples d’œuvres modernes ou redécouvertes. La rétrospective par laquelle Cinemania lui rend hommage à la Cinémathèque québécoise montre bien l’étendue du talent de Lambert.
Dans La Vouivre d’après Marcel Aymé, Georges Wilson dirige son fils dans le rôle d’Arsène, un soldat revenant de guerre dans un petit village où il est un des rares jeunes hommes. Le passage au fantastique vers cette fée maléfique des marais devient trop littéral dans ce long métrage où les portraits de femmes sont pour la plupart très négatifs. La prestation remarquable du jeune acteur dans ce rôle d’ancien combattant traumatisé constitue donc le principal intérêt de cette incursion chaotique.
Lambert Wilson trouve par ailleurs chez Resnais un guide et un compagnon dans quatre films où il peut s’amuser de manière subtile à jouer avec son image dans une troupe de comédiens complices comme dans Pas sur la bouche, élégante adaptation d’une opérette française où Wilson chante et interprète un Américain guindé plus vrai que nature. Cette faculté à jouer avec son image ressort aussi dans son hommage à Céline Dion que rend son personnage du dictateur de la Palombie dans un des meilleurs moments de Sur la piste du Marsupilami, épisodefacilement visible sur Youtube.
Court aussi tout au long de sa carrière des personnages poussés par leur implication sociale et leur sens du devoir comme l’Abbé Pierre qu’il fait plus qu’incarner dans Hiver 54 de Denis Amar ou bien entendu le père Christian, centre du film de Xavier Beauvois, Des hommes et des dieux sur la nécessité de témoigner par les actes autant que les paroles de la charité dans des circonstances difficiles. Lambert Wilson donnera aussi une classe de maître dans le cadre de cet hommage bien mérité.
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