28 juillet 2015
Pour la vingt-cinquième fois, le festival Présence autochtone se déroule à Montréal. Pour célébrer cet anniversaire, les auteurs-compositeurs-interprètes Florent Vollant et Richard Desjardins reprendront, ce samedi 31 juillet à la Place des festivals, dans une nouvelle formule Blues Blanc Rouge remix, le concert-bénéfice du printemps 1991 auxquels ils avaient participé pour financer le premier festival. Celui-ci fut créé pour montrer la diversité des cultures autochtones et ce un an après les événements d’Oka en été 1990. Depuis le festival s’est complexifié par des volets: arts visuels, danse et même théâtre ou cuisine.
Pour rappeler la crise d’Oka, le festival présentera les films Kanehsatake, 270 ans de résistance et Ruse et traité? de la réalisatrice abénaquise Alanis Obomsawin à laquelle cette revue a déjà consacrée des articles. Les relations complexes entre Occidentaux et peuples autochtones sont le sujet du très beau film de fiction Yvy Maraey. tierra sin mal où la réalisateur bolivien Juan Carlos Valdivia se rend dans le parc du Grand Chaco sur les traces du grand ethnologue suédois Erland Nordenskiöld. C’est tout d’abord un dialogue qui s’installe entre Andres et Yari, son guide guarani, qui sont interprétés par Valdivia et son coscénariste Elio Ortiz.
L’opposition entre dedans et dehors et entre nature et culture se conjugue dans une road movie d’une grande beauté cinématographique où les archives visuelles sont aussi très bien intégrées. Tout aussi achevé picturalement, Café: cantos de humo du Mexicain Hatuey Viveros Lavielle rend compte de la vie d’une famille nahuatl dont le fils ainé Jorge se prépare à devenir avocat. La deuxième partie du titre Chants de fumée explique la manière dont le réalisateur nous fait partager le digne quotidien de cette famille prise entre tradition et nouveauté dans un intérieur peu éclairé ou dans des monts et vallées où roulent les brumes. On peut comprendre que le film se soit vu décerner le Sesterce d’or au festival de Nyon 2014.
En Amérique centrale également, le paysan très âgé Marcelino Galice, survivant du massacre de 1932, continue son petit bonhomme de chemin transmettant ses connaissances musicales et ses souvenirs afin que continue la danse du tigre et du cerf dans l’attachant portrait El tigre y el venado de son compatriote Sergio Sibrián. Au Paraguay. le Chaco est actuellement le lieu d’une grande déforestation et le réalisateur italien Andrea Ruffini, auteur de plusieurs films sur l’Amérique latine, rend compte de l’effet dévastateur de cette destruction sur les populations aborigènes de ce pays dans Comer del monte – Food in the wood. Avec empathie et une caméra vivante, Ruffini accompagne ces Yamet dans leurs opérations de cueillette.
Dans les années 60 et 70, de nombreux groupes musicaux, ici et ailleurs, ont mené à une prise de conscience en devenant les porte-paroles de revendications de divers types. Au Groenland, le groupe Sumé a construit une onde de choc en chantant en Kalaallisut ( langue inuite de ce pays) sur des muiques rock. Malik Høegh et Per Berthelsen, jeunes éduqués alors au Danemark, y avaient pris conscience de leurs différences et avaient trouvé ce moyen pour exprimer leur volonté de prise en chage des destinées de leur immense région. C’est ce que démontre, de manière un peu nostalgique, le documentaire Sumé: The Sound of a Revolution du cinéaste et artiste visuel Inuk Silis Høegh. Des entrevues avec les membres du groupe et des adeptes servent de fil conducteur à une présentation d’image d’archives diverses qui permettent de comprendre comment la pochette du deuxième disque représentant un dessin d’un «esquimau» tuant au harpon un blanc ait pu susciter tant de réactions. L’alliage de la musique et des paroles sous-titrées rappellera à certains d’autres groupes plus familiers. Voilà quelques-uns des films et vidéos dont un hommage au Wapikoni mobile présentés dans ce festival qui continue de montrer sa pertinence malgré les difficultés de financement.
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