Entrevues

Sylvain L’Espérance

27 février 2017

EXTRAIT /
ENTREVUE
Transcription : Jérôme Delgado

307_Sylvain L'Espérance

© ONF

« LA GRÈCE, C’EST
CE QUI NOUS ATTEND… »

Dévoilé aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal, en novembre 2016, Combat au bout de la nuit est un film-fleuve porté par le désir de lutter contre les mesures d’austérité des gouvernements. Sylvain L’Espérance s’est tenu à le tourner en Grèce, mais il le considère comme un écho de l’état du monde. Sa présentation dans la section Panorama de la 67e Berlinale, en février 2017, le ravit particulièrement parce qu’on lui a annoncé avoir voulu faire, avec cette sélection, « un geste politique ». Le documentariste québécois ne pouvait mieux être servi, lui qui cherche, derrière sa caméra imprégnée de poésie, à suggérer des formes de résistance. 

Tel un migrant en soif d’un monde meilleur ou vivre, Sylvain L’Esperance a quitté le sud en direction du nord. Le voici sur les rives de la mer Méditerranée avec son huitième documentaire, le long métrage Combat au bout de la nuit — très long : 285 minutes, soit presque cinq heures en trois parties. Depuis l’arrivée des années 2000, sa filmographie était exclusive à l’Afrique et en particulier aux zones autour du Niger (le fleuve). Après cinq titres et une période de 12 ans, entre La main invisible (2002) et Bamako (2014), le cinéaste québécois a planté sa caméra en Grèce, porte d’entrée pour beaucoup de déplacés qui rêvent d’Europe. Bien qu’il admette encore porter dans la tête comme dans le coeur le continent noir — « je trouverai l’occasion de retourner en Afrique », dit-il en entrevue —, il savait qu’il devait passer à autre chose. Ou plutôt à un autre lieu, parce que dans le fond, la Méditerranée lui permet d’explorer le même thème : l’état du monde. « Quand je tournais en Afrique, j’avais le sentiment de faire un film sur l’état du monde. [En Grèce], j’ai le sentiment d’être en parfaite continuité en filmant des Africains, des Syriens », estime-t-il.

Sylvain L’Esperance n’a pas cherché à sortir d’un coin du globe, par simple souci, pour se renouveler. Il a suivi, pour le dire ainsi, le courant. Il tournait Sur le rivage du monde (2012), documentaire sur des migrants rencontrés au Mali, et la terre s’est mise a rugir. La planète vivait le Printemps arabe. « Je me disais qu’il serait intéressant d’aller dans les pays du sud de l’Europe, la où des révoltes populaires avaient lieu. Je voyais un lien entre elles et les révoltes arabes. C’étaient des révoltes (…)

Texte intégral
Séquences
Nº 307 (Mars-Avril 2017)
Pages 6-9
En kiosque : Mars 2017

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