27 octobre 2017
Six musiciens, un chanteur. Lambert Wilson le charmeur, le séducteur, l’homme de théâtre et de cinéma, le chanteur. Avec une étonnante et tendre humilité, il se laisse emporter par les chansons d’Yves Montand, autre bête de la scène et de l’écran.
Autre époque, autres mœurs. Car les paroles des airs explorés dans Wilson chante Montand évoquent un temps où l’insouciance était poésie, où les rapports hommes-femmes, du moins dans les cercles bohèmes, constituaient un mélange de fidélité, de trahison, d’adultère, de concubinage, de canaillerie, de tous ces maux actuels qui, aujourd’hui, innondent la presse quotidienne et sont devenus des sujets tabous. Car, il semble que dans ce temps-là, l’amour triomphait de toutes les blessures.
Par les temps que nous vivons, le solo Wilson ressemble à un acte de résistance, un essai théâtral où le chant n’est prétexte qu’à un dialogue perçant entre l’artiste et le spectateur. Mais surtout et avant tout, un regard sur l’état des lieux. De La bycyclette de Francis Lai et Pierre Barouh, nous passons au Dormeur du Val, signée Luis Bessières et Arthur Rimbaud. Sans oublier le célèbre Barbara de Joseph Kosma et Jacques Prévert. Ces chansons parlent de tout et de rien. Atmosphère, emportement, se laisser attendrir par la poésie qui les illumine. Rien d’autre que cela… bonnement, la vie !
Wilson chante Montand, c’est l’évocation d’un temps béni de la chanson française. C’est aussi le rapport entre celui venu d’ailleurs et son intégration dans une France où règne encore la célèbre devise « liberté… égalité… fraternité » ; adage qui, dans un sens, a perdu sa véritable signification.
Et puis, on voit aussi Wilson le comédien. Il bouge, ne cesse de bouger. Transforme la scène en un space ludique qui lui sied à merveille. La première fois, vers le milieu du spectacle, il salue les spectateurs virtuels au fond de la scène, faisant dos aux vrais spectateurs. Un tour de magie aussi simple que généreux de la part de Christian Schiaretti, conquis autant par le personnage sur scène et par l’hommage fait au grand de la chanson. On saluera l’excellente direction musicale de Bruno Fontaine, et bien entendu, la performance enjouée de ses cinq autres musiciens. Il sera question de Marilyn Monroe, de la phase-Amérique de Montand… Hommage ou respect envers ce grand comédien-homme de scène ? À chacun d’en juger. Et bizarrement, on ne sait vraiment pas pourquoi, le visage de la grande Simone Signoret, femme de Montand à un moment de sa vie, s’installe discrètement dans notre for intérieur.
Seul bémol : l’absence de l’attendu Les roses de Picardie, sans doute vieillot, mais empreint d’une nostalgie dont on a besoin aujourd’hui pour combattre le spleen généralisé. Dommage ! Mais il s’agit là d’un show à ne rater sous aucun prétexte.
WILSON CHANTE MONTAND | Mise en scène : Christian Schiaretti – Son : Gilles Olivesit, Nicolas Servant – Éclairages : Tony Weber – Direction musicale : Bruno Fontaine, au piano, accompagné de Pierre-Alain Tocanier (batterie), Christophe Walemme (basse, contrebasse), Armance Quero (violoncelle), Roland Pinsard (clarinette, saxophone), Baptiste Germser (cuivres) – Distribution : Lambert Wilson – Production : Les Visiteurs du Soir / Démons Productions, en coprod. avec le TNP (Théâtre national populaire)
TNM (Théâtre du Nouveau Monde)
Durée : 2 h approx. (sans entracte)
Représentations : Jusqu’au 5 novembre 2017
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes]
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