24 décembre 2017
On aurait voulu tout aimer de cette édition 2017 de l’incontournable Cirque du Soleil. Si Crystal, l’héroïne, nous rappelle en quelque sorte une Alice aux pays des merveilles des temps modernes, force est de souligner que Crystal, le spectacle, nous désoriente, du moins à moitié.
Tout d’abord une première partie qui ne cesse de chercher sa propre voie, perdue entre les apparats du cirque et les codes du spectacle sur glace. Numéros à piège, cela devient une évidence; la stratégie de la mise en scène consiste, pour atténuer un propos limité, à plaire à la galerie; justement, en imposant un interminable jeu de hockey lourdement chorégraphié, brisant avec le côté purement artistique du spectacle, Crystal, dans cette partie, laisse indifférent. Les autres numéros, convenables.
Et on se met à penser aux premiers « Cirques du Soleil », où un groupe d’illuminés extraordinaires et professionnels réinventait la discipline circassienne, brisant avec ces anciens chapiteaux à animaux (qui, dans en sens, nous manquent), s’accordant à l’air du temps. Aujourd’hui, la devise est de plaire le plus possible à tout le monde, c’est-à-dire au grand public, moins curieux (et pas vraiment) des innovations que de voir sur scène ce à quoi ils s’attendent.
Musique populaire oblige (et en anglais seulement), car le show doit être exportable partout au Canada (et ailleurs sans doute), aucun air original comme dans le passé. Oui, il existe une musique de cabaret, comme il existe une musique de cirque. C’est dans la logique de chaque discipline. Le CDS l’a déjà prouvé à maintes reprises.
Et une voix off, en français, douce certes, accueillante, mais qu’on avait du mal à comprendre. On laisse alors tomber au bout de quelques minutes et on se laisse envoûter par ces numéros d’effets spéciaux sur la glace, qui n’a rien à voir avec les artistes. C’est de la pure mécanique.
Et puis, après l’entracte, froid extérieur qu’on n’a pas encore oublié, on souhaite prendre une boisson, dans notre cas, un bon café pour oublier l’hiver sibérien qu’on a dû subir; mais ça coûte une petite fortune. En fait, ce n’est pas une question d’argent, mais c’est pour le principe. Je crois que cette Mecque du sport, principalement du hockey, profite de l’enthousiasme increvable de ses visiteurs pour, comme on dit chez nous, « charger cher ».
Mais bon, on retourne pour une deuxième partie où cette fois-ci, sans nous avertir, le Cirque du Soleil reprend ses droits et, sans toutefois oublier l’auditoire d’une arène hivernale comble, impose sa propre vision du spectacle aux spectateurs. Mais en même temps nous rappelant que le show circassien a un rapport perplexe et amoureux avec la scène, le sol, les airs, le tapis, et que la glace artificielle ne correspond pas à sa vision. Pour vous rendre compte, allez voir au cinéma The Greatest Showman / Le maître de scène. La preuve : dans ce deuxième chapitre, les comédiens, en grande partie, ne portaient pas de patins. Et ils avaient l’air heureux.
Le spectacle suit alors la tradition et, bizarrement, les spectateurs adhèrent avec sincérité, chaleur et comme il se doit, ne renoncent guère à leur éternelle standing ovation (ou ovation debout si vous préférez). En art, même populaire, les créateurs se doivent de conserver leur originalité et ne pas avoir peur du public. Il suivra car il est tout à fait conscient des efforts que mettent les créateurs pour réaliser un bon travail. Avouons tout de même que cet Acte II de Crystal sauve la mise.
Durée
1h 45 approx. (1 entracte)
Représentations
Jusqu’au 31 décembre 2017
Centre Bell
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