28 juin 2018
RuPaul n’est pas si loin de là. De semaine en semaine, d’une façon ou d’une autre, elle interpelle l’icône à l’allure androgyne Grace Jones, adulée par une certaine frange de la communauté homosexuelle. J’ai visionné Grace Jones: Bloodlight and Bami au récent festival Image+Nation. Mais la critique de l’Establishment culturel n’en a pas vraiment parlé, en attendant cette sortie commerciale, donc totalement légitime et, à ses yeux, de meilleur bon goût. Mais arrêtons-nous de pester, on ne reviendra pas là-dessus. Certains thèmes dans le milieu sont tabous.
Toujours est-il que le film de Sophie Fiennes, sœur des deux autres, fait partie, qu’on le veuille ou pas, de la liste des films du répertoire queer cinema, de plus en plus en vogue dans certains milieux bohèmes branchés des grandes villes occidentales ouvertes d’esprit.
Rien de condamnable dans ce Grace Jones: Bloodlight and Bami, titre on ne peut plus vampiresque qui défie les lois de la représentation scénique. La Jones n’est pas conventionnelle, loin de là. Elle s’applique constamment à désorienter mêmes ses plus grands ou plutôt grandes admirateurs/trices, déjouant le jeu des sexualités tabous, renouant avec une idée de l’érotique qui a plus à voir avec la séduction et la provocation qu’avec toute autre considération d’ordre philosophique.
Mais derrière ces maquillages outrageux qui lui donnent un air non seulement étrange, mais également jubilatoire, carnavalesque, mais si adorablement jouissif, derrière ces gestes provocs qui interpellent la rage du désir et un immense plaisir de la scène non seulement assumé, mais bien vivant, comme s’il s’agissait d’un micro territoire qui lui appartenait, Grace Jones vit dans une bulle scénique et qui ne cesse d’exister que lorsqu’elle va voir ses parents, quelque part à la Jamaïque. C’est à ce moment que Grace Jones devient femme, citoyenne, joignant le communauté des mortels et dialoguant avec la vie, la politique, le cinéma, la société pluraliste, ne s’empêchant pas plus tard, avant un concert à Paris, d’être un peu chiante avec un chauffeur de taxi et des organisateurs du spectacle. C’est du Grace Jones, grandeur nature, voire même colossale.
Grace Jones, c’est le vice et la vertu, c’est l’âme et la conscience, c’est se perdre et se retrouver. C’est en fin de compte un rendez-vous tout le contraire de manqué, artiste accomplie prête à satisfaire la curiosité d’une foule de spectateurs pour qui l’art de la représentation est sans doute un attroupement politique, un combat de résistance. Et ovationner l’artiste, c’est aussi donner un sens à sa propre vie.
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Sortie
Vendredi 29 juin 2018
V.o.
Anglais; s.-t.f.
La vie en Grace Jones
Réalisation
Sophie Fiennes
Genre
Documentaire
Origine
Irlande / Grande-Bretagne
Année
2016
Durée
1 h 55
Distributeur
Cinéma du Parc
[Kino Lorber]
Horaires & info.
@ Cinéma Beaubien
Cinéma du Parc
Classement
Tous publics
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MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul / ½ [Entre-deux-cotes]
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