16 août 2018
Ce n’est pas que Benoît Poelvoorde n’ait eu son quota de personnages complexes depuis le rôle de Ben dans C’est arrivé près de chez vous (1992). Il nous semble cependant que jamais il n’avait déployé l’éventail de son immense talent avec autant de finesse qu’avec le Pierre de 7 jours pas plus (2017), vieux garçon pénible et tatillon qui cache sa sensibilité de petit orphelin sous des dehors bourrus. Quand Ajid, un jeune Indien dépouillé de tous ses biens et jeté en bas d’une camionnette, déboule littéralement à ses pieds, Pierre touché par la vulnérabilité de ce petit homme qui ne parle que le Bengali, l’aide malgré ses résistances à se laisser toucher – au propre comme au figuré.
Pour son premier long métrage Héctor Cabello Reyes a choisi de reprendre l’excellent scénario du film argentin El Chino (2011) de Sebastián Borensztein et de le transposer en France. Si cela fonctionne, c’est parce que Pierre est bien plus qu’un personnage : c’est un archétype. Pierre, c’est la France profonde aux prises avec des étrangers vulnérables dont la langue et le mode de vie est à cent lieues du sien. Pierre, c’est la colère de cette France face aux administrations qui renvoient leurs responsabilités aux calendes grecques. Pierre, c’est la France qui aide tout en râlant. Pierre c’est aussi une France isolée, fustigée par ses élites, qui trouve son unique salut dans la communication la plus vraie et la plus authentique, celle qui se passe de mots.
Si Poelvoorde montre l’étendue de son talent, il se ferait presque damer le pion par la performance d’Alexandra Lamy et surtout par celle de Pitobash Tripathy, acteur célèbre à Bollywood, dont les regards à eux seuls valent leur pesant d’or. Le contexte d’une quincaillerie dans une petite ville de province, filmée toute en étroitesse, offre un admirable décor de petits tiroirs, de boulons et de vis, qui projettent habilement le personnage maniaque de Pierre, lequel prendra son expansion jusqu’à la scène finale, dans un paysage de grande nature nue.
La grâce de ce film réside dans des notions qui semblent oubliées à l’heure de la peur du terrorisme : compassion, sensibilité, naïveté, gentillesse. L’autre versant du Happy End de Michael Haneke, en somme.
Sortie
Vendredi 17 août 2018
Version originale
français
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Réal.
Héctor Cabello Reyes
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Genre
Comédie
Origine
France
Belgique
Année : 2017 – Durée : 1 h 32
Dist.
Axia Films
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Horaires & info. @
Cinéma Beaubien
Classement
Tous publics
Langage vulgaire
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MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]
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