16 août 2018
Le conflit le plus médiatisé du monde, celui qui, par sa position géographique, suscite les passions les plus extrêmes, soulève des vagues d’indignation, crée des partisans d’un côté ou de l’autre et, mine de rien, qu’on le veuille ou pas, fait apparaître un nouvel antisémitisme diasporatique, plus intellectuel que racial, encore plus menaçant puisque sourd.
Quoi qu’il en soit, c’est la problématique du « mur » que soulève Cam Christiansen, grâce à l’écriture fortement simple, précise et ô combien significative de David Hare, dramaturge, metteur en scène et réalisateur dont la réputation n’est plus à faire parce que discret, presque intimiste, ne soulevant pas l’ire des lecteurs ou des spectateurs. Et puis un film, Wall, un mur de lamentations d’aujourd’hui, qui sépare, qui divise, qui évite le rapprochement. Au nom d’une fausse sécurité, bien que dans le film, un des intervenant confirmera que les attentats contre Israël ont reculé de 80%, et qui laisse à penser que dans la société civile israélienne, la critique du gouvernement n’est pas nécessairement dans l’ordre du jour. Pour la simple raison qu’il est question d’un très jeune pays dont les premiers habitants sont sortis, pour une grande part, de l’enfer et que certains vivent encore. Les stigmates de la déchirure européenne, de la mise en éxécution d’un extermination qui n’a pas de nom, mais qui persiste dans son discours d’expropriation.
Les Palestiniens ensuite, dépossédés, sémites eux aussi, cousins presque germains de l’autre sémitisme. Rêvant d’un retour dans leurs terres volées, et des petites colonies bâties par-ci, par-là, habitées par des gens qui s’en fichent du conflit, la majorité non politisée.
La Palestine, c’est la souffrance, les actes de terrorisme du Hamas, une mauvaise entente avec la Cisjordanie, le bordel en quelque sorte ; Israël, c’est la fausse insouciance, l’occidentalisation qui a balayé les grands rêves socialistes des premières années de l’État ; un pays démocratiquement capitaliste. Un gouvernement où on permet aux partis politiques d’en faire partie.
L’Islam et le judaïsme, deux croyances millénaires qui se ressemblent comme deux gouttes d’eau. La paix sans doute possible si l’on en juge par la magnifique et poignante fin de Wall, un mur plein de signes de pays, Israël entouré de la Palestine et autres pays arabisants. Possible, c’est du moins ce que prône le cinéma, en général, depuis son invention.
Et cette adaptation à l’écran d’un monologue scénique singulier construit les preuves du discours à travers un essai visuel d’un magnétisme hallucinant. Nous sommes pratiquement à l’intérieur de deux territoires en suspens, comme si le temps jouait contre eux.
On craignait le parti pris idéologique. Loin de là. Il y a, dans le personnage de David Hare, en tenue animée, un rapport humaniste au problème, une politisation intellectuelle dont le verbe et la parole réfléchie sont les principaux atouts. Salutaire travail de mise en scène par deux artistes pris par le vif du sujet. Christiansen et Hare, une complicité tacite qui évite courageusement et avec une volonté farouche tout rapport partisan ou condamnable.
Pendant ce temps, la terre tourne et les conflits mondiaux naissent à pas de géants. Le prix à payer, autant pour les uns que pour les autres, en vaut-il la chandelle ? Encore une fois, Israël et la Palestine, des ombres dans un ciel bleu, des zones géographiques paradoxales. Et une terre biblique qui n’a pas cessé de vivre ses multiples tourments.
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Sortie
Vendredi 17 août 2018
Version originale
anglais; s.-t.f.
Le mur
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Réal.
Cam Christiansen
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Genre
Documentaire / Animation
Origine
Canada
Année : 2017 – Durée : 1 h 19
Dist.
ONF
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Horaires & info. @
Cinéma du Parc
Cinémathèque québécoise
Classement
Tous publics
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MISE AUX POINTS
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★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]
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