Séquences – La revue de cinéma

En salle

Lizzie

4 octobre 2018

| PRIMEUR |
Semaine 40
Du 5 au octobre 2018

RÉSUMÉ SUCCINCT
Le 4 août 1892, Lizzie Borden fait la macabre découverte des corps mutilés de son père et de sa belle-mère dans la maison familiale de Fall River, au Massachusetts. À la suite d’une enquête qui repose principalement sur des allégations, la femme de 32 ans est accusée des homicides et citée à procès.

CRITIQUE
| Élie Castiel |

★★★

COMPLICES

Le film rappelle le cas des sœurs Papin, deux employées de maison et auteures d’un double meurtre sur leurs patronnes. L’affaire avait même incité des réalisateurs à faire des adaptations cinématographiques, dont celle de 1963, Les abysses, de Nikos Papatakis.

Ici, nous avons affaire à un exemple judiciaire célèbre américain, survenu vers la fin du 19^e siècle. L’Américain Craig William Macneill joue le tout pour le tout en signant un troisième long métrage dont l’approche clinique correspond au drame qui se joue, en fait, qui se prépare de jour en jour. La musique de Jeff Russo (entre autres, le récent Mile 22, de Peter Berg) oscille vaillamment entre le minimalisme et la symphonie douce, amère, inquisitrice. Air inquiétant, annonciateur, au diapason de la tragédie à venir.

Film d’une froideur hallucinante, qui peut désorienter,
mettre mal à l’aise, mais qui ne laisse pas indifférent.

Film réussi grâce à une direction d’actrices remarquables; de ces femmes au bord de l’hallucination, de la déambulation fantôme, chaque geste compte; ressemblant à une préparation, aux gestes quasi contrôlés d’un double meurtre brillamment orchestré et dont la répétition est sans conteste le véritable acte commis.

La rarissime Chloë Sevigny (sans doute, Sévigny), né de père Québécois et de mère américano-polonaise, livre une performance inoubliable, suivant une trajectoire équilibrée entre le senti et le dissimulé. Elle fait face à Kristen Stewart, passionnante dans un rôle à contre-emploi qui lui sied à merveille. Entre les deux, une double complicité, comme comédiennes et comme personnages au bord de l’irréversible.

Film d’une froideur hallucinante, qui peut désorienter, mettre mal à l’aise, mais qui ne laisse pas indifférent; tout le contraire, selon l’état d’esprit du spectateur, ce dernier participe à une œuvre difficile d’accès, mais au pouvoir fascinant, porteuse de multiples variations psychologiques sur le comportement humain.

Dont un carton explicatif final, faisant subtilement état de la condition féminine à une époque pas si lointaine de la nôtre et qui pousse à la réflexion.