22 novembre 2018
Le plus fréquent plan-séquence n’a jamais été aussi bien servi que dans ce film politique grand public. Et dans The Front Runner, c’est d’autant plus éclatant, se mêlant si près à une meute de journalistes en délire qu’on croit à un révolte médiatique. Mais on s’aperçoit que ça fait partie des toutes les époques depuis que le journalisme est devenu un énième pouvoir : Insensible, sans pitié, calculateur, indiscret.
Les candidats mâles à former un nouveau gouvernement, non seulement aux États-Unis, mais partout dans le monde (même si certains pays ont l’art de bien cacher certaines indiscrétions) doivent montrer l’exemple en affichant une vie privée affranchie de tout scandale qui pourrait nuire à la crédibilité de l’État.
L’auteur du charmant Juno a construit une œuvre nostalgique d’une époque (les années 1980) du cinéma américain avec un savoir-faire impeccable : astucieuses directives dans les mouvements de caméra, lieux de tournage méticuleusement signalés, éclairages appropriés, notamment toutes ces scènes dans des salles de conférence de grands journaux de l’heure où l’imprimé régnait en maître, mais lieux aussi où se planifiaient souvent le destin d’un pays et la vie d’une famille potentiellement présidentielle.
Effectivement, pas de vie privée. Le sexe ne paie pas. Est-ce un crime de Dame Nature? Lorsqu’il s’agit de guerres, de conflits armés, de génocides un peu partout dans la planète, rien n’arrête les infaillibles erreurs humaines même si des groupes qui croient encore en l’humanisme s’y opposent. Mais lorsque le sexe public entre par la grande porte, le puritanisme judéo-chrétien rappelle ses commandements, quitte à briser des vies.
Mais le quatrième pouvoir est là, hypocrite, en quête de lecteurs avides de sensations fortes. Alors que dans le privé, si on devait arrêter ou poursuivre des individus coupables de faux pas, un haut pourcentage de la population en ferait partie.
En bon (im)moraliste, Reitman n’y va pas de main morte, accordant à l’approche naturaliste une qualité irréprochable, comme ces juxtapositions entre les documents d’archives et la fiction qui se déroule à l’écran, pour certains spectateurs, témoins d’un temps qui passe à une allure effrénée mais aussi d’une époque actuelle où les choses n’ont pas vraiment changé. Peut-être même empiré.
Distribution exceptionnelle de la part de tous les comédiens, rôles secondaires compris. Mais particulièrement de la part de Vera Farmiga, impeccable, et de Hugh Jackman, dans une de ses meilleures prestations. Physique approprié, gouaille, affichant un contrôle de soi maîtrisé et un charisme stupéfiant. Mais les droits de femmes subissent encore, à cette époque-là, des réverbérations. D’où les allusions aux éclats licencieux actuels. Une question de pouvoir selon Jason Reitman, né à Montréal, aux origines juives et québécoises (catholiques). La mixité peut faire fureur favorablement.
Sortie
Vendredi 23 novembre 2018
Langue(s)
V.o. : anglais
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Réal.
Jason Reitman
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Genre : Chronique politique – Origine : États-Unis
Année : 2018 – Durée : 1 h 53
Dist.
Columbia Pictures
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Info. @
Cineplex
Classement
Tous publics
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MISE AUX POINTS
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½ [Entre-deux-cotes]
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