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Présence autochtone 2019

7 août 2019

< FESTIVAL >
Luc Chaput

AVENUES D’AFFIRMATION

En cette année où bientôt la rue Amherst à Montréal changera finalement de nom et deviendra Atateken  (terme mohawk pour  fraternité), le festival Présence autochtone https://www.presenceautochtone.ca/fr, pour sa 29e édition, présente un aperçu foisonnant des diverses cultures de ces populations qui s’affirment de nombreuses manières dans un monde où les dérèglements climatiques menacent également leurs modes de vie.

Words from a Bear

Il y a cinquante ans, en 1969, Navarro Scott Momaday était le premier auteur amérindien américain gagnant du prix Pulitzer de fiction pour son roman House Made of Dawn. Inspiré par les contes et légendes de ses ancêtres Kiowa et Cherokee et continuant d’une autre manière l’œuvre de sa mère, l’écrivaine Natachee Scott Momaday, l’auteur et universitaire, à travers ses divers écrits, revisite l’histoire ancienne et récente de ses congénères blancs et amérindiens dans une œuvre où les symboles irriguent une langue fine et pourtant accessible. Le réalisateur Jeffrey Palmer dans Words from a Bear en brosse un portrait complexe pour un épisode de la télésérie American Masters où collègues, parents et amis artistes rendent hommage à un des porte-paroles de cette Renaissance amérindienne.

Le réalisateur russe d’origine yupike Aleksei Vakhrushev, dans Kniga Morya (The Book of the Sea) allie animation pour les épisodes sur les légendes et belles images tournées souvent par une caméra à l’épaule pour les épisodes de chasse, cueillette dans ce périple chez les Tchoukches. La transmission des savoirs et des valeurs prend ainsi des détours inattendus chez ce peuple du Nord-est de la Sibérie près du détroit de Béring et voisins des Inuits dans cette région arctique.

The Book of the Sea

Près de l’Équateur, un jeune cinéaste allemand, Alexander Hick, réussit à se faire accepter par un peuple gardien de montagnes de la Colombie et Thinking like a Mountain devient une escalade par monts et par vaux de l’histoire et la spiritualité de ces Arhuacos. Dans une région limitrophe, le peuple wayuu, sujet du très beau film de fiction Les Oiseaux de passage (Pájaros de verano) de Ciro Guerra et Cristina Gallego, montre des pratiques funéraires que certains qualifieraient d’insolites. Les cinéastes colombiens César Alejandro Jaimes et Juan Pablo Polanco, par une luxuriante cinématographie qui intègre l’hier et le maintenant, nous convient à une délicate immersion. En Équateur, une ceinture tressée sert de lien intime entre tradition et modernité dans la chaleureuse autofiction Huahua (Child) de Jose Espinosa.

Un adolescent Krahô déjà marié, Ihjac, vivant dans l’état de Tocantins au Brésil, est embarqué dans d’autres rites funéraires qui le dépassent dans Le Chant de la forêt (Chuva É Cantoria Na Aldeia Dos Mortos) des cinéastes brésilien et portugais João Salaviza et Renée Nader Messora. Le jury d’Un certain regard à Cannes 2018 a eu raison de lui décerner son prix spécial et il aura fallu ce festival pour qu’on puisse le voir finalement en nos lieux.

De nombreux films documentaires et de fiction, courts et moyens métrages seront également montrés, avec pour la plupart la possibilité de recevoir les prix Rigoberta-Menchu, Teueikan, APTN et autres dont celui remis par cette revue. Parmi les autres activités, en plus de l’aspect gastronomique, il faut signaler les concerts de la compositrice Katia Makdissi-Warren où les chants de gorge Inuits et Mongols seront à l’honneur.

Le chant de la forêt

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