20 septembre 2012
DRAME | Origine : Russie – Année : 2011 – Durée : 2 h 20 – Réal. : Alexandre Sokourov – Int. : Johannes Zeiler, Hanna Schygulla, Anton Adasinsky, Georg Friedrich, Antje Lewald – Dist. / Contact : FunFilm | Horaires / Versions / Classement : Cinéma du Parc – Excentris
Résumé
Penseur et rebelle, Faust est également un homme attiré par la luxure, la cupidité et les incontrôlables impulsions. D’après l’œuvre de Goethe.
En quelques mots
★★★★
Lion d’or au Festival de Venise 2011, le nouveau film-d’œuvre d’Alexandre Sokourov est en soi un pari intellectuel pour la simple raison qu’il ne s’agit pas pour le cinéaste d’établir uniquement un dialogue avec les fondements artistiques, littéraires et politiques du siècle précédent, mais au contraire, d’intégrer ces mêmes préoccupations existentielles dans un univers purement cinématographique géré par les lois rigides et complexes de la forme et de la narration. Car tout dans Faust est question de mise en scène. Après Moloch (1999), Taurus (2000) et Le Soleil (2004), premiers trois volets d’une tétralogie, ceux-ci consacrés aux grands dictateurs du XXe siècle, en l’occurrence Hitler, Lénine/Staline et l’empereur Hiro-Hito, Sokourov choisit ici l’angle du mythe, de l’anti-héros littéraire tel qu’imaginé par Goethe. Contrairement aux premiers films de la série, Faust convoque l’idée de l’allégorie plutôt que de l’Histoire, fable qui rejoint le comportement de l’homme lorsque ce dernier est confronté au chaos d’une perte de quelque chose qu’il ne peut saisir, qui lui échappe ; en d’autres mots, son âme. Au nom de quoi ? Au nom de qui ? Au profit sans doute d’une rétribution terrestre, une sorte de damnation infernale ; et si l’on se fie aux images, on est en droit de se demander s’il ne s’agit pas d’un châtiment dantesque qui ressemble aux supplices de l’enfer. D’où la caméra de Bruno Delbonnel (directeur photo, entre autres dans Harry Potter and the Half-Blood Prince et Dark Shadows) qui se faufile partout et illumine les espaces d’un XIXe siècle aux tons brumeux rappelant la peinture allemande (et flamande) qui a donné naissance à l’art romantique. Ce dialogue entre le cinéma et l’iconographie n’est sans doute pas nouveau dans la pensée sokourovienne. Mais ici il ne fait que s’affirmer davantage pour produire une œuvre généreusement ingénieuse, austère et brillante. Intentionnellement, Sokourov déroute le spectateur, le poussant à décortiquer une intrigue abstraite puisqu’il s’agit de faire évoluer l’âme, de la situer au milieu des humains, de la rendre concrète. Ce n’est donc pas par hasard si Faust commence par l’autopsie d’un cadavre, comme si cet acte nous prévenait que le film n’est après tout que la confrontation entre le corps et la pensée, entre la matérialité et l’intellect, entre la séduction et l’abandon et, finalement, sur le rapport de l’homme à l’univers. De cette aventure, Sokourov projette des images déformées, révèle des comportements excessifs et parfois grotesques. Et finalement, l’homme, objet imparfait manipulé par la puissance et l’attrait compulsif de ses faiblesses, finit par succomber à ses pulsions. En quelque sorte, Alexandre Sokourov nous parle tout simplement de la condition humaine. Mais il le fait avec une intelligence qui tient de la pure magie parce qu’il s’agit d’une interrogation, chose sur laquelle repose tout acte cinématographique. >> Élie Castiel
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Remarquable. ★★★ Très bon. ★★ Bon. ★ Moyen. ☆ Mauvais. ☆☆ Nul … et aussi 1/2 — LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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