10 mars 2013
>> Élie Castiel
Un détenu condamné à la peine capitale reçoit le réconfort d’une religieuse.
Avouons que contrairement au français, à l’allemand, au russe et, bien sûr, à l’italien, l’anglais n’est pas un idiome normalement conçu pour l’opéra. Mais dès les premières paroles chantées dans Dead Man Walking, opéra moderne de Jake Heggie, nous sommes dans un autre monde. Un univers si proche, mais qui dans le même temps nous échappe tant le côté dramatique est d’une force poignante et surtout réaliste.
Ceci dit, c’est la mise en scène d’Alain Gauthier qui étonne le plus. Un monde carcéral placé à différents niveaux, mis en évidence par un jeu d’éclairages astucieux, voire même spirituels, se juxtoposant parfaitement bien au sujet, un récit sur la culpabilité, la foi, le mensonge, la recherche de la vérité, le pardon et en fin de compte la rédemption. Si dans la version cinématographique de Tim Robbins (1995), Susan Sarandon et Sean Penn s’abandonnaient dans des rôles magnifiquement interprétés, force est de souligner, ici, le jeu intériorisé et organique d’Étienne Dupuis et celui, mystique, d’Allyson McHardy. Dans l’opéra moderne, et encore plus dans Dead Man Walking, la principale difficulté réside dans le jeu, qu’il s’agisse des mouvements corporels ou des expressions du visage. Il faut une dose d’énergie pour laisser de côté les paramètres de l’opéra traditionnel pour les remplacer par d’autres façons de composer, gesticuler, de faire « réaliste ». Sur ce point, la nouvelle production de l’Opéra de Montréal est une réussite.
Mais s’agit-il vraiment d’opéra ? On pense surtout aux drames musicaux présentés à Broadway, endroit propice pour ce genre de spectacle. Mais qu’importe, car des moments intenses de silence, des non-dits perturbants, notamment dans la dernière séquence, suscitent chez les spectacteurs une angoise prenante qui perturbe ses sens et bouleverse toute logique. Et c’est à ce moment là qu’on réalise que si les événements rendent parfois la mort inévitable, le rachat est une affection spirituelle qui ne peut être brisée. >> ★★★
DRAME | Compositeur : Jake Heggie – Livret : Terrence McNally, d’après le livre de sœur Helen Prejean et du film de Tim Robbins – Direction musicale : Wayne Marshall / Orchestre Métropolitain / Chœur de l’Opéra de Montréal – Mise en scène : Alain Gauthier – Décors : Harry Frehner, Scott Reind – Costumes : Scott Reid – Éclairages : Éric W. Champoux – Chanteurs principaux : Allyson McHardy (Sister Helen Prejean), Étienne Dupuis (Joseph De Rocher), Kimberly Barber (Mrs. Patrick de Rocher), Chantale Nurse (Sister Rose), Alain Coulombe (George Benton), Kpjm Mac Master (Father Grenville) | Durée : 2 h 45 (incluant 1 entracte) | Prochaines représentations : 12, 14 et 16 mars 2013, à 19 h 30 / Place-des-Arts (Salle Wilfrid-Pelletier).
COTES
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