L’ARTISTE EN SON SIÈCLE

>> Luc Chaput

Pour la 31^e année, en cette fin d’hiver, on retrouve à Montréal le Festival international des films sur l’art qui propose un panorama plutôt complet de la production cinématographique mais souvent de format télévisuel explorant les  diverses formes artistiques. Comme souvent le portrait est privilégié et cette année, l’implication de l’artiste dans son siècle est illustrée par le film d’ouverture Fatwa: Salman’s Story où l’animateur Alan Yentob revient avec son ami Salman Rushdie sur le récit Joseph Anton où ce dernier décrit  son parcours du Pakistan à la Grande=Bretagne et les années où il dut se cacher à cause de l’arrêt de mort lancé par l’état iranien contre lui en 1989 pour ses Satanic Verses.  La complicité de l’intervieweur et du romancier est évidente et certains témoignages donnent d’autres éclairages sur ce long et  pénible parcours.

Créer des ponts entre les cultures peut être le fait de certains artistes et La Longueur de l’alphabet de Joe Balass est un portrait juste et amical d’un de ces passeurs de l’inter-culturalisme, Naïm Kattan, juif de Bagdad devenu écrivain québécois et directeur pendant vingt-cinq ans du Conseil des Arts du Canada. Ce rappel d’une vie permet aussi au réalisateur d’illustrer l’implication alors importante des organismes publics dans la diffusion de la culture. Certains musées favorisent ces échanges interculturels en donnant un part plus adéquate à certaines de leurs collections hier oubliées ou mal présentées. Richard Copans dans La Main tendue, les arts de l’Islam au Louvre illustre avec doigté et empathie la construction du nouveau bâtiment de ce département qui montre bien la diversité  des apports de cette civilisation  millénaire placée avec soin et passion par ses conservateurs  dans un très bel écrin architectural de ce monument de la culture mondiale.

L’auteur français Pierre Assouline réussit son premier film en laissant dans Le Siècle de Cartier-Bresson ce célèbre photographe expliquer dans de judicieux extraits auditifs ces œuvres et sa vie compliquée. Assouline continue ici de brillante façon son travail commencé dans une biographie de 1999. La qualité de la cinématographie rajoute à la beauté de l’expérience. Wim Wenders (Paris Texas) est un des artistes interviewés dans La Toile blanche d’Edward Hopper et l’on comprend encore mieux l’influence que cet important peintre américain a eu sur plusieurs cinéastes. Le Fifa dans sa section sur le 7^e art présente six documentaires  de la série Il était une fois … sur la genèse et le tournage d’un film majeur. Ayant déjà vu naguère celui de Bruno Nuytten et Serge July sur les aléas du Dernier Tango à Paris,  les autres apparaissent d’aussi grande qualité. Voilà bien  comment encore une fois une information culturelle diverse et  passionnée  est diffusée dans ce festival.