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Le Murmure du coquelicot

21 septembre 2013

L’AUDITION

Texte: Élie Castiel
★★★

Devenu acteur pour des raisons reliées à son enfance, particulièrement dans ses rapports avec sa mère qui a décidé de quitter la famille, Raymond, aujourd’hui la soixantaine, se décide à auditionner pour un rôle. Madame B. le reçoit et lui pose un tas de questions qui ne semblent avoir aucun lien avec le but de leur rencontre.

Création du collectif Les 7 doigts de la main, le dialogue qui se crée entre le cirque contemporain et le théâtre finit par convaincre les spectateurs du bienfait de cette étrange et sublime aventure. Déjà, la présence des deux comédiens de haut calibre, Rémy Girard et Pascale Montpetit, assure la qualité du spectacle. Car Le Murmure du coquelicot est avant tout un spectacle plus qu’une pièce de théâtre traditionnelle.

Le célèbre Coquelicot de Claude Monet, tableau datant de 1873, sera l’élément déclencheur de ce récit sur l’indentité, sur les souvenirs autant amers que merveilleux de l’enfance, sur le passage à la vie d’adulte et les drames de l’existence. Sur scène, la double identité de Raymond s’exprime sur la vie, le vie, l’absence de l’autre, les regrets, la mauvaise chance en amour. Il s’appelle Raymond et se présente comme un personnage à deux noms de famille, selon les circonstances (ou questions posées). Cette dualité, ce côté binaire s’adapte admirablement bien avec les membres de la troupe des 7 doigts qui, chacun à sa façon, s’enchevêtre à Raymond pour mieux lui soustraire les parties les plus intimes de l’esprit. Ils agissent sans doute comme chœur grec, assistants de cette étrange et énigmatique Madame B. qui devra ou pas accorder le rôle à Raymond.

Le codes du théâtre traditionnel sont déconstruits au profit d’un accord le plus souvent harmonieux entre deux disciplines. La mise en scène de Sébastien Soldevilla (un des membres des 7 doigts) se révèle inventive, instinctive et d’une simplicité bienvenue. Si ses acolytes sont, comme on s’y attend, d’excellents acrobates, leur jeu est cependant hésitant et leurs voix ne projettent aucunement une expérience théâtrale.

Débarrassé de ses tics habituels, Rémy Girard compose un double personnage habilement, habitant l’espace scénique avec détermination et une tranquille résilience . Du moins en ce qui nous concerne, Pascale Montpetit est méconnaissable dans le rôle de Madame B., alliant sans effort froideur, distanciation et rigidité jusqu’à la catharsis, alors que se dénouent les mystères de ce bizarre récit avec, comme prime, une finale éblouissante.

COMÉDIE DRAMATIQUE / CIRQUE | Auteur : Sébastien Soldevila (Les 7 doigts de la main) – Mise en scène : Sébastien Soldevila – Scénographie : Olivier Landreville – Éclairages : Éric Champoux – Musique originale : Nans Bortuzzo – Costumes : Lucien Bernèche – Comédiens : Rémy Girard (Raymond), Pascale Montpetit (Madame B.), ainsi que Émilie Bonnavaud, Raphael Cruz, Danic Gagnon Plamondon, Mathias Plaul, Suzanne Soler, Samuel Tétreault  | Durée : 1 h 30 (sans entracte)  – Représentations : Jusqu’au 12 octobre 2013 –  TNM (Théâtre du Nouveau Monde)

COTE
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Remarquable. ★★★ Très bon. ★★ Bon. Moyen. Mauvais. ☆☆ Nul … et aussi 1/2 — LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES

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