28 septembre 2013
Pour se réinventer une meilleure vie, pour attirer la chance, pour fuir une famille dysfonctionnelle et la misère, cinq jeunes gens de 16 à 20 ans d’un quartier pauvre de Montréal s’adonnent à la contrebande de cigarettes. Parmi eux, une jeune fille, Ciboulette, en amour avec Tarzan, le chef du groupe. Mais Tarzan commet l’irréversible. Un policier enquête.
L’une des plus belles partitions du théâtre classique québécois annonce de façon sublime la saison 2013-2014 au Théâtre Denise-Pelletier. Tout d’abord, un texte, pour l’époque (1953) et encore aujourd’hui, innovateur, conciliant, touchant au conscient québécois avec une profonde humanité, celui du grand Marcel Dubé, farouchement proche de son identité nationale, de sa culture, de l’âme de celle-ci, des faux-pas du petit peuple, de l’entraide, mais aussi de la trahison.
Au fond, le récit, magnifiquement adaptable au cinéma, est d’une émouvante simplicité. Car c’est pas la force des mots de Dubé que nous sommes les témoins de cette histoire, avant tout d’amour qu’on aurait pu intituler « Ciboulette et Tarzan ». Mais l’auteur québécois a préférer lui attribuer l’épithète de « Zone ». Un seul mot évocateur de multiples significations : urgence, frontière, marginalité, classe sociale, risque, et tous ces constituants qui entourent les classes sociales défavorisées. Mais dans la plume de Dubé, l’individu conserve son intégrité, son statut sacré d’être humain, le respect auquel il a droit. Et l’amour aussi, car quelle que soit l’origine sociale, l’amour se vit de la même façon.
Pour incarner ces personnages, six acteurs possédés par des mots simples parce qu’ils reflètent le langage de tous les jours, celui du milieu d’où ils viennent, mais d’où s’échappent également une sincérité, une franchise, une vérité et un naturel inné. Car en quelque sorte, Zone peut être classé dans la catégorie du théâtre québécois néoréaliste, proche du néoréalisme cinématographie italien : même latinité, mêmes angoises, mêmes mots devant le sentiment amoureux, même tourments de l’existence, mêmes instruments de survie.
Qu’il s’agisse de Nicolas Desfossés, Dave Jennis, Maxime Lavoie Jean-Simon Traversy ou encore de l’adorable Frédérique Thérien, sans oublier Richart J. Léger, tous occupent la scène avec assurance. Le décor au milieu de l’espace rappelant une sorte d’échafaudage non fini surprend au début, mais on comprend vite qu’il s’harmonise avec la fonction de catharsis du récit. La 50e saison du TDP s’amorce avec la même pièce présentée lors de l’inauguration du nouvel édifice en 1977. La boucle est ainsi bouclée. L’avenir s’annonce prometteur.
DRAME URBAIN | Auteur : Marcel Dubé – Mise en scène : Jean-Stéphane Roy – Décors : Dominic Manca – Éclairages : Guillaume Houêt – Costumes : Nina Okens – Conception sonore : Jean-Michel Ouimet – Comédiens : Nicolas Desfossés (Tarzan), Dave Jenniss (Moineau), Maxime Lavoie (Passe-Partout), Frédérique Thérien (Ciboulette), Jean-Simon Traversy (Tit-Noir)| Durée : 1 h 50 (incluant 1 entracte) – Représentations : Jusqu’au 18 octobre 2013 – Théâtre Denise-Pelletier (Grande Salle)
COTE
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