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Glengarry Glen Ross

23 mars 2014

MENSONGES ET TRAHISONS

Élie Castiel
CRITIQUE
★★★ ½

En 1992, l’adaptation cinématographique de James Foley, avec entre autres, Al Pacino et Jack Lemmon, avait reçu l’accueil favorable du public et de la critique. Et pourtant, il s’agit d’une pièce plutôt intimiste de David Mamet. Tout se passe dans deux endroits différents, dans un bar où commencent à se définir les premiers soubresauts de la corruption, et le bureau, tout en désordre, conséquences de toutes ses conversations autour de verres persuasifs et corrompus.

Mais ce qu’il faut surtout retenir de la thèse de David Mamet, excellent observateur de son temps, c’est avant tout les résultats du capitalisme sauvage et les répercussions sur l’individu. Monter cette pièce aujourd’hui est de rigueur. Pour montrer que rien n’a changé. Qu’au contraire, tout a empiré car les méthodes menant au mensonges et à la manipulation sont beaucoup plus sophistiquées et revêtent un caractère indicible.

Maintenant producteur artistique du Centre Segal, Paul Flicker signe ici sa première mise en scène. Évitant les temps morts, faisant du rythme un personnage à part entière, dirigeant les acteurs avec une certain fébrilité, il propose une adaptation qui respire, ne cesse jamais de désintéresser le spectateur et montre un côté prometteur. Comme dans le film de Foley, les comédiens sont tous excellents, même si dans le rôle de Shelly Levene, R. H. Thomson n’évite pas, par moments, d’imiter Al Pacino (dans la version cinématographique), alors que ce dernier

Tenait le rôle Richard Roma. On peut tout de même lui pardonner car il s’agit d’un des plus grands acteurs du théâtre canadien.

Les décors de Michael Eagan se conjugent adéquatement aux événements. Les conversations dans le bar sont sur fond noir, donnant un caractère secret aux conversations. La deuxième partie, plus lumineuse, fait écho au film noir, un des plus importants du cinéma hollywoodien. Les éclairages de Luc Prairie y participent avec bonheur, rendant l’ensemble à la fois crédible et distancié. Entre les comédiens, la scène et les spectateurs, une distanciation bienvenue qui n’empêche cependant pas l’auditoire de réfléchir sur ses propres exprériences.

Avec Glengarry Glen Ross, le Segal continue sa saison théâtrale sous le signe de la qualité et de la remise en question des enjeux sociaux et, par extension, politiques.

DRAME SOCIAL
Auteur : David Mamet – Mise en scène : Paul Flicker – Décors / Costumes : Michael Eagan – Son / Musique : Dimitri Marine – Éclairages : Luc Prairies – Comédiens : Graham Cuthbertson (John), Tristan D. Lalla (Baylen), Daniel Liliford (Dave), Mike Paterson (James), Michel Perron (George), R. H. Thomson (Shelly), Brett Wastson (Richard) | Durée : 1 h 40 (incl. 1 entracte) – Représentations : Jusqu’au 30 mars 2014 – Centre Segal.

COTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Remarquable. ★★★ Très bon. ★★ Bon. Moyen. Mauvais. ☆☆ Nul … et aussi ½ — LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES

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