21 mai 2015
De retour en France pour visiter son frère Vincent, sujet à des troubles psychologiques, la réalisatrice décide de le conduire dans un lieu qui a marqué leur enfance.
À l’instar de Karina Garcia Casanova et son récent film Juanicas qui explorait l’impact de la maladie de son frère sur une famille déchirée, c’est à un voyage des plus intimes que nous convie Les Mondes de Vincent de la réalisatrice Rozenn Potin (Attention Féministes!, 2011), littéralement partie à la rencontre de son frère Vincent, un homme aussi déroutant qu’attachant dont le quotidien bat au rythme de la schizophrénie.
Avec ce premier long métrage d’une émouvante simplicité, la réalisatrice nous donne un bien précieux. Celui de nous montrer l’inexprimable d’une maladie qui laisse sans voix pour lequel les références et les analyses factuelles n’ont pas vraiment de place. Son film, ce n’est pas juste une petite sœur qui filme un voyage sur la Côte d’Azur avec un frère malade en cherchant dans de vieux films de famille les raisons d’une folie qu’on ne nomme pas. Son film, c’est nous et seulement nous, armés de nos pensées hiératiques face à des comportements, des univers, pleinement incompréhensibles.
En filmant cet homme à la fois ultra lucide et totalement indicible, elle laisse à l’objet filmique le soin de démontrer. Aucune entrevue de médecin et en guise de mise en contexte une voix off remémorant des souvenirs d’enfance ainsi que les quelques bribes d’une mère ou le mutisme gêné d’un père. Le sentiment de culpabilité, le poids regard des autres, Potin les dit en quelques mots seulement. Pas besoin d’aller plus loin dans l’emphase.
Certes, en l’absence de toute tentative d’analyse, Les Mondes de Vincent est de ces œuvres qui ne se laissent pas facilement apprivoiser. Des silences, des lenteurs et des chuchotements de voix obscures, voilà bien l’entrelacs de mondes parallèles dans lesquels nous plongeons sans avoir les clés de la compréhension. Des portes que personne ne peut vraiment ouvrir, sauf Vincent, seul dans son univers et seul à pouvoir y en sortir, comme le dira la réalisatrice dans un commentaire déchirant situé à la toute fin du film.
Hélas, Les Mondes de Vincent ne joue que trois jours au Cinéma Excentris de Montréal (22, 23 et 24 mai. Plusieurs séances seront accompagnés de discussions après la projection).
Genre : Documentaire – Origine : Canada [Québec] – Année : 2014 – Durée : 1 h 20 – Réal. : Rozzen Potin – Dist. / Contact : Les Films du 3 mars.
Horaires : Excentris
CLASSIFICATION
Visa GÉNÉRAL
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ (Entre-deux-cotes) – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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