RÉSUMÉ SUCCINCT
Passionné par l’Aéropostale, un infographiste décide de construire son propre kayak lorsqu’il constate qu’il existe des ressemblances frappantes entre la coque du bateau et le fuselage d’un avion.

CRITIQUE
★★★★

BOUFFÉE D’AIR PUR
Texte : Charles-Henri Ramond

Il y a des films qui portent dans leurs gênes une pure sensation de bonheur. Sans fanfares ni trompettes, ils affirment leur inaliénable volonté de transmettre le plaisir de la manière la plus sincère et la plus communicative qui soit. Comme un avion de Bruno Podalydès s’inscrit indéniablement dans cette veine là. Sous des atours de comédie tendre et décalée, il signe avec ce septième long métrage une ode à l’oisiveté et au bonheur retrouvé dans laquelle on retrouve l’appel du large déjà évoqué dans Liberté-Oléron, son second film. Il fait du voyage une quête initiatique, une échappatoire aux réalités d’une vie devenue essentiellement virtuelle. Son protagoniste (qu’il incarne lui-même) n’est pas concepteur 3D pour rien. Grâce à sa frêle embarcation, il part vers l’inconnu et échoue aux abords d’une auberge au charme magnétique, peuplée d’êtres aussi charismatiques qu’iconoclastes. Ce havre de paix lui permet de reconnecter à l’instant présent, la tranquillité, l’amitié, la paresse et avec toutes ces valeurs simples et superflues que nous ne savons plus comment savourer.

Comme un avion a une âme et porte en lui  quelque
chose  de profondément enraciné, résumant
parfaitement l’esprit d’une France libre
(et libertaire!), insouciante et ouverte à l’autre.

Du film se dégage une sérénité nouvelle, filmée sur un rythme volontairement lent mis en images avec délicatesse par la caméra de Claire Mathon (la superbe photo de L’inconnu du lac, c’est elle). Aérienne, elle glisse sur les cours d’eau et en épouse les méandres. Lascive, elle embrasse les courbes d’un corps de femme, belle et naturelle, aux antipodes de la superficialité des couvertures de magazines (superbe Agnès Jaoui, lascive telle la Vénus du Titien). Attentive, elle capte le vertige de l’absinthe imbibant un morceau de sucre, annonciateur de l’ivresse à venir. Et amoureuse, elle montre le couple complice, à l’image de la dernière scène du film d’une absolue tendresse dans laquelle Sandrine Kiberlain accompagne son mari le long du ruisseau. Il pagaye, libre dans son rêve, elle l’accompagne sur la rive, prête à se porter à son secours en cas de dérive.

Certes, Alexandre le bienheureux d’Yves Robert n’est pas loin, mais l’auteur nous remémore aussi les délicieuses chroniques du Front Populaire tournées dans cette France des années trente retrouvant la quiétude de l’après guerre et s’abandonnant enfin à la liberté des congés payés. Cette auberge perdue dans des boisés verdoyants a les atours de la guinguette d’À nous la liberté de René Clair, elle recèle les amours clandestines de Lumières d’été de Jean Grémillon et offre l’insouciance des paradis perdus de La belle équipe de Julien Duvivier. La nostalgie refait surface. Comme un avion a une âme et porte en lui quelque chose de profondément enraciné, résumant parfaitement l’esprit d’une France libre (et libertaire!), insouciante et ouverte à l’autre.

Baigné dans une trame sonore parvenant à elle seule à sublimer les états d’âme des personnages, le film est une bouffée d’air pur portée par des comédiens remarquables, tout en étant un vibrant hommage à la comédie populaire, en ce qu’elle de plus noble. De plus en plus rares sur nos écrans, voilà des images qui font du bien à l’âme. Une félicité dans le parcours chaotique du cinéphile.

Sortie
vendredi 25 déccembre 2015
Version originale
français

Genre : COMÉDIE – Origine : France – Année : 2015 – Durée : 1 h 45 – Réal. : Bruno Podalydès – Int. : Bruno Podalydès, Sandrine Kiberlain, Denis Podalydès, Agnès Jaoui, Michel Vuillermoz, Vimala Pons – Dist. / Contact : FunFilm.
Horaires : @  Cineplex

CLASSEMENT
Tout public

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [ Entre-deux-cotes ] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.