10 mars 2016
RÉSUMÉ SUCCINCT
En 1909, Karamakate, chaman vivant seul et reclus au fin fond de l’Amazonie, rencontre Theodor, un ethnologue blanc très malade qui le convainc de l’accompagner au coeur de la forêt pour y trouver de la yakruna, une plante mystérieuse aux vertus guérisseuses et hallucinogènes capable d’agir sur les rêves.
Des judicieuses images en noir et blanc, des paysages de l’Amazonie à couper le souffle et un récit haletant, ponctué de nombreux va-et-vient dans le temps : L’étreinte du serpent est un film coup-de-poing, de ceux qui ravissent à plusieurs égards. Ce troisième long métrage d’un cinéaste peu connu, le Colombien Ciro Guerra, est d’autant plus significatif qu’il dénonce, avec poésie et à-propos, un saccage culturel et environnemental. La quête d’une mystérieuse plante guérisseuse et hallucinogène a d’ailleurs valeur de symbole, aux multiples résonnances.
Le choix du noir et blanc se justifie amplement ici. Le récit oppose deux mondes, deux croyances, voire deux manières d’apprécier la réalité, l’approche onirique du chaman amazonien versus la vision terre-à-terre et scientifique de l’ethnologue venu du Nord. Or, le réalisateur, également crédité au scénario, a la délicatesse de ne pas prendre position. C’est en noir et blanc, mais rien, dans cette rencontre entre les civilisations, n’est ni tout noir ni tout blanc. Il y a des zones grises, volontairement mises en scènes pour laisser le public en seul juge. Seule exception, peut-être : les sauvages ne sont pas les Indiens d’Amérique, mais les représentants de l’Église catholique, démonisés dans des séquences torrides et audacieusement blasphématoires.
Film historique, scindé en deux temps (en 1909 et en 1940), L’étreinte du serpent respire l’authenticité du documentaire, d’autant plus qu’il s’inspire des récits de deux personnages réels, l’explorateur allemand Theodor Koch-Grünber et le biologiste bostonnais Richard Evans Schultes. Or, il s’agit d’une fiction, à l’instar du cinéma de Werner Herzog, auteur de deux films en Amazonie (Aguirre, la colère de Dieu et Fitzcarraldo). Cino Guerra lance de nombreux clins d’œil à Herzog, notamment par des dialogues en allemand et par la présence d’un phonographe. Or, le cinéaste colombien se montre volontiers de l’autre côté du mur, laissant la plus grande place aux langues autochtones (cubeo, huitoto, wanano, tikuna) et faisant du personnage du chaman le véritable cœur du film. Son souffle. Ne dit-on pas de l’Amazonie qu’elle est le poumon de la planète?
Genre : DRAME ETHNOGRAPHIQUE – Origine : Colombie / Venezuela / Argentine – Année : 2016 – Durée : 2 h 05– Réal. : Ciro Guerra– Int. : Jan Bijvoet, Nibio Torres, Brionne Davis, Antonio Bolivar, Yauenkü Miguee, Nicolas Canciro – Dist. / Contact : Northern Banner.
Horaires : @ Cinéma du Parc
CLASSEMENT
NC (Non classé)
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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