15 avril 2016
RÉSUMÉ SUCCINCT
Sam, journaliste français né d’un père algérien, fréquente incognito une mosquée clandestine de la région parisienne. Cette incursion au sein d’une frange de l’islam guidée par un imam radical lui permet de nouer des liens avec trois jeunes hommes, Youssef (né Christophe), Sidi et Driss. Ces derniers attendent avec impatience le retour de Hassan, leur leader parti s’entraîner pour le djihad dans un camp au Pakistan.
C’est avec Le convoyeur (2004) que Nicolas Boukhrief se fait connaître au Québec ; film de genre assez réussi dans un contexte de cinéma hexagonal, à l’époque, plutôt frileux. Changement de registre avec Made in France, où la montée du djidahisme n’est pas tant la trame narrative principale, mais le point autour duquel se construit l’idéologie de la terreur, au nom d’une fausse vision de la religion.
Contrairement à La désintégration, le très beau film de Philippe Faucon, axé sur la parole, celui de Boukhrief opte pour le polar auquel il administre une dose de psycho-politique fort bien dosée. Pour le cinéaste, l’affaire Merah constitue l’élément déclencheur à la réalisation du film, une fiction plausible. Si le cinéaste évite le message, il n’en demeure pas moins qu’il se dégage de l’ensemble l’idée selon laquelle la société se doit de comprendre les raisons pour tous ces actes terroristes : Français issus de l’immigration considérés comme des citoyens de seconde zone ; racisme et xénophobie exarcerbée de la société française ; avancée du Front National. La banlieue est le terrain de prédilection pour attirer les nouveax adhérents à cette guerre d’idéaux déformés. L’Islam radical est montré dans sa facette la plus sombre, et ce n’est que par la parole qu’une caméra tournant autour des protagonistes se permet d’en retirer ses enjeux les plus sombres.
Cinq personnages en quête d’attentat et qui, par le biais d’Internet, prison et autres espaces virtuels marginaux, organisent tout un programme pour destabiliser l’ordre établi. Il y a Hassan, ayant été formé au Pakistan, Driss, convaincu de la validité de la cause, Christophe, issu d’une famille catholique qui voit en l’Islam intransigeant l’occasion de quitter son milieu bourgeois. Et Sidi, qui ne pense qu’à l’adrénaline que procure l’accomplissement de l’acte irréversible. Finalement, Sam, l’enquêteur qui réussit à se faufiler dans ce filet dangereux.
Ce que montre Boukhrief est bel est bien que très souvent, les nouveaux adhérents à ces groupuscules de la terreur sont des humains avant tout et que leur vision détournée de la réalité les pousse à combattre la vie, au profit de la mort, pour des idéaux qu’ils ne comprennent pas tout à fait.
Contrairement au film de Faucon, celui de Boukhrief est plus centré sur la corporalité autant que sur la parole. Le corps n’est plus une masse physique, mais une bombe à retardement prête à exploser. Par la préparation de l’acte, la charpente humaine se métamorphose selon les décisions et les mots prononcés. La réalité est estropiée, laissant la place à une relation bestiale et désordonnée entre le corps et l’esprit.
Ce féroce rapport complice est évident dans Made in France, titre intentionnellement en anglais pour signifier que ces actes peuvent avoir lieu partout, comme c’est le cas d’ailleurs si l’on en juge par les événements récents. Avec le recul, on s’aperçoit que la lutte n’est pas finie. C’est là où réside le « nouveau désordre mondial ». Le côté spectaculaire du film se concrétise ainsi par tous ces ingrédients de mise en scène que Nicolas Boukhrief arrive brillamment à enclencher.
Genre : SUSPENSE – Origine : France – Année : 2014 – Durée : 1 h 30 – Réal. : Nicolas Boukhrief – Int. : Malik Zidi, Dimitri Storoge, François Civil, Nassim Si Ahmed, Naila Harzoune – Dist. / Contact : Axia.
Horaires : @ Beaubien – Cineplex
CLASSEMENT
Interdit aux moins de 13 ans
(Violence)
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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