28 avril 2017
Fille de la comédienne-chanteuse Marie Laforêt, Lisa Azuelos signe des comédies qui lui valent le respect d’un certain grand public. Elle ne s’embarrasse guère du qu’on dira t’on, notamment émanant des critiques. Mais à un moment donné, elle décide pour un genre sérieux avec un sujet dramatique : la vie de Dalida. Usant admirablement de l’ellipse, ironiquement, le cheminement de la chanteuse est vu par le grand bout de la lorgnette. Nous avons rencontré la réalisatrice.
Après un parcours dans la comédie, vous prenez le risque du biopic avec, comme sujet, une grande dame de la chanson pop française. Était-ce pour vous un défi ? C’est d’ailleurs votre meilleur film.
Moi aussi, en toute humilité, je crois bien que c’est mon film le plus réussi. En fait, les films sont comme les enfants ; ils nous appartiennent et ils ne nous appartiennent pas. Vraiment. Et j’ai beaucoup travaillé en même temps que je me suis laissée emporter par Dalida. C’est un mélange des deux. J’ai senti que je n’avais d’autre choix que de faire le film. Je me suis donc laissée envoûter par cette merveilleuse histoire ; peut-être un peu trop tragique pour moi, habituée à un autre genre. Mais bon… Et dans le même temps, ça correspond profondément à ma mélancolie et aussi… je dirais que j’ai eu une traversée de vie assez difficile et par conséquent, la proposition était parfaite à ce moment précis.
Justement, mais pourquoi Dalida ?
Chez Dalida, il y a cette part manquante en chacun de nous, cette sensation d’incomplétude, de vide difficile à capter, indicible en quelque sorte. Et qui, pour la plupart, ne peut être comblé que par l’amour, le pur, l’inconditionnel. Et Dalida, elle en est morte. Elle sentait toujours qu’il y avait une part incomplète en elle.
Comment s’est effectué le choix de la comédienne principale ?
Le fait d’avoir choisi Sveva Alviti a été une évidence, un pur moment de grâce. Il fallait que quelque chose se passe lors de l’interprétation des chansons. Le cas de Je suis malade est un exemple brillant dans le film. Une émouvante correspondance se passe entre la voix de la vraie Dalida et le visage d’Alviti.
Dans Dalida, il n’y a pas seulement une mise en scène en rapport avec la fiction, mais également une « mise en chansons » qui s’équilibre avec les situations.
Oui, effectivement. J’ai fait beaucoup de recherche et il fallait que les chansons correspondent aux moments traversés dans le film non seulement en ce qui a trait à Dalida, mais également aux personnes qui l’ont côtoyée. D’une certaine façon, le choix musical est un procédé qui a avoir avec l’intuition, un goût pour telle ou telle chanson.
Le personnage du père demeure un peu ambigu ? Était-il du côté des fascistes ?
Pas du tout. Pour moi, c’était un homme apolitique. Vous savez, on invente parfois des histoires incongrues sur cette époque. Ça a été le cas des Japonais aux États-Unis, par exemple. Ce sont les conséquences des conflits armés.
D’une certaine façon, le destin de Dalida évoque celui de Maria Callas, morte d’une certaine façon d’un chagrin d’amour.
En effet, j’ai beaucoup pensé à la Callas. J’avais vu la pièce et j’ai trouvé qu’il y a avait des parallèles entre les deux femmes : succès, adulation du public, vie amoureuse intense, mais manque d’amour véritable et, surtout, un souhait de vie « normale » comme la plupart des femmes. Dans leurs années de gloire, elles incarnent toutes les deux une sorte de féminité conquérante, souveraine, totale et libre.
Après Dalida, il vous sera impossible de faire marche arrière.
En effet, le travail dans ce film a été beaucoup plus exigeant. Il s’agit d’un drame biographique où le risque est évident et impose un travail plus rigoureux. J’ai beaucoup appris de cette aventure lumineuse. Même si j’ai recours de nouveau à la légereté, ça sera de façon différente avec, comme point de départ, l’expérience de l’épisode-Dalida.
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