15 juin 2017
Mieux connu sous le nom de scène de 2Pac, Tupac Shakur est un rappeur, poète et acteur américain qui, malgré son assassinat à l’âge de 25 ans, aura laissé sa marque dans le milieu de la musique contemporaine. All Eyez On Me se présente sous la forme d’un film biographique et tente (en vain) de revenir sur tous les aspects de la vie du rappeur. Afin de relater le récit et de motiver les retours en arrière sur diverses périodes de sa vie, Tupac (Demetrius Shipp Jr.) se confesse à un documentariste; d’abord sur son enfance et l’implication militante de sa mère dans les Black Panthers.
Cette section présentant davantage Afeni Shakur (qui participera à la production du film avant sa mort en 2016) aurait gagné à être plus étoffée (notamment quant à l’historique du mouvement) afin d’ancrer les assises militantes de Tupac. Le spectateur est ainsi projeté de 1995 (prison d’État), ramené en 1971 (procès de sa mère), pour retourner en prison, puis à Baltimore dans les années 1982, pour se diriger vers Oakland en 1988. Puis, le spectateur est baladé des confessions de la prison, jusqu’aux péripéties de Tupac chez Interscope Records, Death Row Records, sans oublier ses démêlés judiciaires et l’enregistrement de ses nombreux succès, jusqu’à son assassinat à Las Vegas le 13 septembre 1996.
La distribution tire son épingle du jeu dans un scénario parsemé de retours en arrière, qui ne font qu’alourdir le récit et casser le rythme. Pour un premier rôle à l’écran, Demetrius Shipp Jr. (que l’on pourrait qualifier de jumeau identique de Tupac), tiens bien les rennes aux côtés de Danai Gurira (Michonne dans The Walking Dead, qui avec cette interprétation sentie, s’enligne pour une carrière à la Viola Davis, selon la teneur des scénarios choisis). Le rappeur et acteur Jamal « Gravy » Woolard reprend le rôle de The Notorious B.I.G qu’il campait dans le film éponyme de 2009.
Ayant réalisé quelques vidéoclips (Nicki Minaj, Drake, Lil Wayne) et un épisode de la série Empire, Benny Boom avait pourtant l’expérience de mettre en image la culture hip-hop américaine. Le réalisateur y intègre d’ailleurs quelques clips de Tupac (Same Song, Brenda’s Got A Baby), qui font davantage office de clin-d’oeils. Ironiquement, All Eyez On Me manque cruellement de dynamisme et de rythme (élément essentiel à tout bon clip musical, mais aussi à tout film musical), proposant ainsi un biopic fade sur un artiste ayant pourtant un parcours de rêve pour faire l’objet d’une production hollywoodienne d’envergure. Il en résulte un film de 2 h 20, beaucoup trop long, où les flashbacks ne font que ralentir le récit au lieu de lui insuffler rythme et mystère. L’utilisation malhabile de ralentis à certains moment du récit, amène un côté cliché aux artifices cinématographiques, alors que la prémisse de base (Tupac faisant ses confessions à un documentariste) aurait très bien pu présenter une esthétique davantage documentaire pour coller à l’étiquette « hors-norme » de l’artiste présenté à l’écran.
Bien qu’il mette en scène certains concerts et la musique de Tupac, All Eyez On Me ne parvient pas à entretenir cinématographiquement la légende et le mystère, au contraire de nombreux autres biopic sur des artistes afro-amércains influents; l’excellent Ray (direction photo soignée et réalisation riche de Taylor Hackford), ou encore Get on Up: The James Brown Story (récit de l’enfance bien ficelé, scénario brillamment déconstruit) ou même Straight Outta Compton (mise en scène dynamique). All Eyez On Me se présente davantage comme un de ces films qui sombrera dans l’oubli (et dans une distribution télé), au contraire de l’artiste influent qu’il met en scène. Tupac était considéré comme un révolutionnaire controversé et brillant. Tout ce que le film All Eyez On Me n’est pas. Néanmoins, ce film (attendu) offre pratiquement une résurrection du mythique rappeur en la peau de Demetrius Shipp Jr., ce qui aura tôt fait de réjouir bon nombre de fans invétérés de 2Pac.
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
CRITIQUE
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