22 juin 2017
Réalisé par John Scheinfeld, Chasing Trane:The John Coltrane Documentary propose un portrait exhaustif du légendaire saxophoniste jazz compositeur et chef de formation américain, né en Caroline du Nord en 1926. Malgré son décès prématuré, à l’âge de 40 ans, il s’imposera comme l’un des artistes les plus importants de la musique de la deuxième moitié du XXe siècle. Ayant partagé la scène avec les Miles Davis de ce monde, il sera considéré, après Charlie Parker dans les années 1940-1950, comme le saxophoniste le plus révolutionnaire et le plus influent de l’histoire du jazz, meneur du courant avant-gardiste dans les années 1960. Nul doute que nombre de musiciens provenant de divers horizons musicaux témoignent de son génie dans Chasing Trane, par le biais d’entrevues à la caméra ; Carlos Santana, John Densmore, Sonny Rollins, Wynton Marsalis, Jimmy Heath (qui remplacera Coltrane, aux côtés de Miles Davis, lors de sa consommation excessive de drogues), sans compter des membres de la famille Coltrane, dont son fils, Ravi Coltrane, aussi saxophoniste de profession.
Chasing Trane se veut le film définitif sur ce grand arstites, un documentaire biographique officiel ayant obtenu le soutien de toutes les maisons de disque avec lesquelles Coltrane a enregistré et collaboré, sans oublier qu’il fut produit avec le consentement absolu de la famille Coltrane. Il en résulte ainsi des témoignages pertinents, provenant de gens ayant connu l’homme, l’artiste ; mais la facture du documentaire demeure des plus classiques et protocolaires (dans ce contexte on s’étonne peu de voir Bill Clinton à l’écran témoigner à plusieurs reprises du génie musical de Coltrane). Et tous vous le diront, Coltrane était un « génie artistique et un géant spirituel ».
Si l’univers de la musique fait connaître (l’enfer de) la drogue à Coltrane, c’est cette même passion musicale, doublée d’une grande spiritualité, qui sauvera ce dernier de sa dépendance à l’héroïne. Dans Chasing Trane, les nombreuses images et vidéos d’archives fouillées font découvrir la vie personnelle et professionnelle de Coltrane, ainsi que son époque : à titre d’exemple, le documentaire n’évince pas le racisme et la ségrégation raciale de l’Amérique de de ces années, les droits civiques américains, les discours de Martin Luther King, les bombardements atomiques et tisse habilement des liens avec l’aspect créatif de Trane, dont la chanson Alabama, écrite en réaction au bombardement de la 16th Street Baptist Church, à Birmingham, Alabama, en 1963, par le Ku Klux Klan.
Si lier les aspects sociaux, politiques et culturels de l’époque au portrait de Trane est nécessairement pertinent, le documentaire ne présente rien de novateur formellement (et ce, au contraire du parcours musical de l’artiste présenté à l’écran). Chasing Trane : The John Coltrane Documentary a tout du documentaire biographique classique; entrevues à la caméra sur fond statique, images d’archives, dessins/animation succincts, collages, symboles (spirituels) intégrés à l’image, et même quelques fondus au noir (idéal pour une télédiffusion). Si la trame sonore laisse toute la place aux compositions de Coltrane, la voix hors-champ, narrée par Denzel Washington, est parfois malhabilement amenée : entre les entrevues, un « je » s’insère sporadiquement sur les images présentées, comme si Coltrane méditait sur sa propre existence. Comme l’un des interviewés le mentionne, la musique de Coltrane « nous donne une autre façon de percevoir l’univers, et ce, à travers la musique ».
De ce fait, il est d’autant plus dommage que la mise en scène du documentaire, de par sa forme rigide et didactique, ne permette pas au spectateur de cinématographiquement transposer le génie et l’originalité de Coltrane, sans oublier sa propre conception de la musique : « Je ne me demande pas si les gens comprennent ce que je fais. La réaction émotionnelle est la seule chose qui m’importe. Du moment que cette communication instinctive s’établit, la compréhension n’est plus nécessaire. » De par sa forme cinématographique très conventionnelle, Chasing Trane: The John Coltrane Documentary s’adresse davantage à un public mélomane que cinéphile. Il est d’ailleurs présenté à Montréal, dans le cadre du Festival International de Jazz.
Genre : Documentaire – Origine : États-Unis – Année : 2017 – Durée : 1 h 39 – Réal. : John Scheinfeld – Dist. : Abramorama.
Horaires
@ Cinéma du Parc
Classement
N/C
(Non classé – Exempté)
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