22 juin 2017
Pas très connu de ce côté de l’Amérique du Nord, sauf par ceux qui suivent les téléséries de nos voisins et ont peut-être vu, entre autres, The Good Girl (2002), le latino Miguel Arteta, né à Porto Rico, présente avec Beatriz at Dinner, sans doute son film le plus achevé. Ère Trump oblige, le scénario Mike White, tout en optant pour une écriture, à la limite, surréaliste, se permet un humour noir qui persiste tout le long du film.
Trois actes définissent au vitriol ce portrait d’un univers corrompu faisant face à une humanité disparue : présentation du personnage de Beatriz, le célèbre souper qui annonce le troisième acte avec un cynisme percuant ; finalement, une fin qu’on ne dévoilera pas car elle définit que les zones d’ombre au cinéma ne sont que le reflet de nos propres quotidiens.
L’amour du gain, la xénophobie latente, la prise en charge de l’Amérique par le pouvoir blanc, la course au gain, quitte à écraser n’importe qui, famille, amis… et les autres. Ces autres, c’est Beatriz, venue d’un autre monde, aujourd’hui tentant de survivre, même temporairement dans une villa protégée. Et puis, comme s’il s’agissait d’un ange exterminateur, ses mots à elle tiennent lieu ici de messages philosophiques quasi mystiques. Ils deviennent la métaphore d’un monde de plus en plus divisé, d’une écorce terrestre qui abritent plus mal que bien une humanité en perdition. Arteta est un intellectuel sincère se prenant pour un philosophe. Et c’est tant mieux, car avec l’aide de son scénariste, il est parvenu à proposer une réflexion sur le devenir de notre humanité ou, faute de quoi, la fin de notre civilisation.
Une séquence entre le formidable et en pleine forme John Lithgow et Selma Hayek, excellente, présente un dialogue aussi simple que profond sur le sens de la vie. C’est là les moments les plus émouvants du film. Quelques paroles prononcées, des expressions de chacun des deux visages qui s’harmonisent avec chacun de leurs mots, annoncent un troisième et dernier acte ouvert à toute les possibilités. Ce qui est certain, c’est que Beatriz at Dinner n’est pas un simple film de plus dans la production américaine, mais une mûre réflexion sur l’état actuel des rapports humains, presque exclusivement régis par les lois d’un néolibéralisme intransigeant.
Genre : Drame social – Origine : États-Unis – Année : 2017 – Durée : 1 h 22 – Réal. : Miguel Arteta – Int. : Selma Hayek, John Lithgow, Connie Britton, Chloë Sevigny, Jay Duplass, Amy Landecker – Dist. : Entract Films.
Horaires
@ Cineplex
Classement
Tout public
(Déconseillé aux jeunes enfants)
MISE AUX POINTS
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