1er novembre 2017
D’une farouche énergie, totalement possédés par les démons de la danse, imiscés dans un monde à part, irréel, surréaliste. Là où l’improvisation est une forme d’art en soi. Les danseurs de la Hofesh Shechter Company s’éclatent dans une scène qui les accueillent à bras ouverts.
Des musiciens font aussi partie du décor, un agencement de murs gris et noirs sur fond de nuages aveuglants qui se déplacent selon les circonstances, sans doute, comme les danseurs, de façon improvisée, au naturel. C’est à un petit miracle scénique que nous assistons, agréablement désorientés et tout aussi éblouis devant un tel spectacle vertigineusement innovateur.
La musique de Shechter, car il compose aussi, est électrifiante, en harmonie avec un Moyen-Orient désemparé, en perpétuel conflit, des différents entre deux peuples qui ne semblent pas trouver d’issue. La faute est aux deux semble dire un Shechter qui assume ses idées politiques, du moins c’est ce qu’il nous semble, avec une liberté sans pareille. Mais dans le même temps, nous apprenons, du moins pour le néophyte, que l’art chorégraphique est une discipline à part, qu’elle ne s’explique pas. C’est un art de l’instinct, de la manipulation du corps et de l’esprit, de la symbiose entre ces deux parties de l’humain. Car avant tout, Grand Finale est une leçon sur la physicalité, ses possibilités et sa puissance éternelle. C’est aussi, pour le maître danseur, l’occasion de cultiver son art pour mieux analyser les questions de société.
Les chorégraphes israéliens en nouvelle danse n’ont jamais été aussi proches de ce qui se passe dans leur pays. Tantôt récidivistes, tantôt interpellés par ce qui ne tourne pas rond dans leur environnement social et surtout démocratique, ils s’appuient sur la danse pour mieux alimenter le discours. Plutôt que de brasser des affaires, ils tissent des idées.
Ces murs aussi hauts que la hauteur de la scène sont ceux qui séparent et divisent. La métaphore est aussi directe que salvatrice. Les danseurs s’évertuent autour et derrière ces étranges et insupportables architectures, mélangeant les côtés, non pas pour trouver des solutions, mais pour permettre aux spectateurs de juger par eux-mêmes.
Grand Finale est un tour de force. Une œuvre moderne, jeune, équilibrée malgré son ton foncièrement bordélique, offrant mille et une variations sur la dynamique du mouvement. C’est à la fois ludique et enfantin, sérieux et grave. Mais ce qui reste à la fin est une lueur d’espoir malgré tout. Puisque ces « murs des lamentations » n’attendent que le bon moment pour tomber et en finir une fois pour toutes. Sublime !
Chorégraphie : Hofesh Schechter – Musique : Hofesh Schecter, et autres auteurs classiques – Orchestre : Hofesh Schechter Company – Décors : Tom Scutt – Lumières : Tom Visser – Costumes : Tom Scutt – Danseurs : Chien-Ming Chang, Frédérique Despierre, Mickael Frappat, Yeji Kim, Kim Kohlmann, Erion Krujam Merel Lammers, Attila Ronai, Diogo Sousa – Présentation : Danse Danse – Production : Hofesh Shechter Company, coproduit avec Sadler’s Wells Theatre, Théâtre de la Ville -Paris/La Villette-Paris et Brighton Dome and Festival.
Représentations
Jusqu’au 4 novembre 2017 – 20 h / Places des Arts (Théâtre Maisonneuve)
Durée
1 h 45 (incl. 1 entracte)
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes]
2024 © SÉQUENCES - La revue de cinéma - Tous droits réservés.