19 juillet 2018
Plusieurs moments forts côtoient l’ennui dans cette comédie dramatique portant sur la vie de l’irrévérencieux dessinateur John Callahan (1951-2010), alcoolique à l’adolescence, paraplégique à 21 ans. Don’t Worry, He Won’t Get Far on Foot tire son nom de l’autobiographie écrite par William Morrow en 1989, dont les droits d’adaptation à l’écran avaient été achetés par le regretté Robin Williams (pressenti d’ailleurs pour incarner lui-même le personnage). S’il n’est pas vraiment une biographie officielle, le film de Van Sant est avant tout l’histoire de douloureuses batailles contre les démons intérieurs. Le combat individuel opposant un homme qui se croit immunisé contre tout à son infirmité est enchâssé dans celui, plus collectif, d’une Amérique prise dans les contradictions.
Mises ensemble, les déchéances personnelles sont certes montrées comme des tranches de vie dramatiques, mais servent aussi à tisser une toile univoque avec comme point central les efforts engagés par toute une communauté pour se reprendre en main. C’est le principe même des groupes de AA. Celui auquel appartient Callahan (un noir homosexuel, une obèse, un immigrant, ou encore un travailleur obsédé) ne représente rien d’autre qu’une micro-société, dont l’individu a failli, mais dont la quête de rédemption passe par l’entraide et le soutien des autres.
Le récit insiste beaucoup sur la culpabilité et le pardon, se concentrant surtout à dépeindre les ravages de l’alcool. Plusieurs faits importants de la carrière du cartoonist sont laissés de côté, ainsi que certains traits de personnalité, notamment son côté plus subversif. Nous n’en saurons donc pas beaucoup plus sur ses relations compliquées avec les femmes, les moteurs parfois sombres de son inspiration, son besoin de briser les tabous ou son combat pour donner une voix aux handicapés. En s’écartant des aspects les plus sensibles de son personnage, Van Sant a échappé de peu aux pièges de l’hagiographie. Il évacue les impertinences de son sujet dans un enchevêtrement répétitif de bons sentiments, de mea culpa consensuel, et de retours en arrière souvent inutiles. Et bien sûr, il use de l’humour, cette arme qui désamorce tout, pour rehausser un propos finalement très rassurant et très convenu sur la capacité de l’humain à faire face avec courage et conviction aux pires drames.
Reste que Joaquin Phoenix s’avère impeccable de justesse et de sobriété. Variant son registre du larmoyant au comique le plus pur, il offre une composition riche qui devrait être remarquée quand viendra le temps des remises de prix. Aussi celle de Jonah Hill, qui incarne avec assurance le sarcasme et la fragilité d’un incroyable mentor millionnaire aux pouvoirs réparateurs. À eux seuls, ils sauvent cette biographie romancée en demi-teintes, dont le véritable mérite est de nous inciter à en apprendre plus sur qui était vraiment cet illustrateur de Portland, qui avait d’ailleurs fait l’objet de son vivant d’un documentaire réalisé par la Néerlandaise Simone de Vries : Touch Me Someplace I Can Feel (2007).
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Genre
Drame biographique
Origine
États-Unis
Année
2018
Durée
1 h 54
Distributeur
Entract Films
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Horaires & info.
@ Cinéma du Parc
Cineplex
Classement
Interdit aux moins de 13 ans
Langage vulgaire
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MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul / ½ [Entre-deux-cotes]
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