26 juillet 2018
Nul doute que l’Afro-américain Daveed Diggs (Colin) illumine l’écran par son charisme, sa retenue, sa volonté à changer de vie, son nouveau rapport au monde et un sens de l’art d’interprétation qui a à voir avec ce côté street-wise et le naturel d’aujourd’hui.
Mais il y a aussi Rafael Casal (Miles), électrifiant, charmeur, iconoclaste, dans un premier long métrage qui devrait le conduire dans les horizons aussi flatteurs que ceux du cinéma indépendant haute gamme. Une force de la nature, à l’(in)conduite presque sexuelle, formant entre son corps, son esprit, la relation avec sa famille (épouse et petite fille) et Colin, son grand copain, une alchimie qui pulvérise tout sur son passage, ou au contraire, renoue avec la vie. Ce va-et-vient est incessant dans le premier opus long de Carlos López Estrada, né au Mexique, aujourd’hui citoyen américain.
Quelle touche! Quelle réappropriation des images en mouvement, c’est-à-dire du cinéma. Sur grand écran, comme il se doit. Estrada multiplie les affiliations thématiques (film noir, thriller, comédie best buddies…), les références sociales comme la gentrification d’une certaine partie de la population, les injustices et quelque chose qui se perd dans la nuit des temps, la croyance au destin.
Ce rapport à une des lois de la condition humaine n’épargne pas ses (anti)héros, car le jeune réalisateur (presque la trentaine) semble avoir une connaissance assez mûre de la vie, de ses contraintes, des erreurs que nous faisons pour nous sortir des nombreux pétrins du hasard. Non, pour Estrada, point de héros, mais des êtres humains, des individus, hommes et femmes, faits de chair et de sang, qui contribuent à faire le Bien et le Mal. Le monde tel qu’il est, dans sa nudité la plus totale. Il retient notre souffle, nous prépare au meilleur et au pire et, mine de rien, avec un code éthique du plan, substitue la puissance et la beauté des images qui défilent sur l’écran, qu’elles soient violentes ou apaisantes, à la réalité de l’existence.
Pour les observateurs avertis, on pourrait déceler une approche homoérotique (latente) de la caméra bien ciblée de Robby Baumgartner. Fantasme? Réalité? Wishful thinking? Qu’importe. Avec Blindspotting, Estrada entre définitivement dans la cour des grands.
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Genre
Comédie dramatique
Origine
États-Unis
Année : 2018 – Durée : 1 h 35
Distributeur
V V S
Horaires & info.
@ Cineplex
Classement
Interdit aux moins de 13 ans
Violence / Langage vulgaire
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MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]
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