En salle

La douleur

13 septembre 2018

| PRIMEUR |
Semaine 37
Du 14 au 20 septembre 2018

RÉSUMÉ SUCCINCT
Juin 1944, la France est toujours sous l’Occupation allemande. L’écrivain Robert Antelme, figure majeure de la Résistance, est arrêté et déporté. Sa jeune épouse Marguerite, écrivain et résistante, est tiraillée par l’angoisse de ne pas avoir de ses nouvelles et sa liaison secrète avec son camarade Dyonis.

CRITIQUE
| Charles-Henri Ramond |

 ★★★★

FILMER LE VIDE

La douleur, c’est Marguerite Duras relatant la pénible attente de son mari déporté Robert Antelme. C’est l’angoisse d’une vie passée sans nouvelles, qu’une auteure jette sur le papier avec des mots aussi justes et précis possibles pour décrire ce temps suspendu, survenu quarante ans plus tôt. Avec cette audacieuse adaptation cinématographique, Finkiel réussit le tour de force de filmer le vide, de donner corps au trou béant créé par le souvenir de l’être manquant. En résulte un récit glaçant, mais non dénué d’émotions, qui dévoile une personnalité obsédée par l’image de la mort, ayant compris bien avant les autres les horreurs des camps de concentration.

 Bien que situé à la fin de la guerre et dans les quelques semaines qui suivirent, La douleur par son rappel aux multiples lâchetés des collabos, est une œuvre d’une brûlante actualité. D’un réalisme chirurgical, cet arrière-plan historique fournit un terrain propice au développement d’une rancœur adressée par la résistante Marguerite D. envers la société française de l’époque. Les mots qu’elle utilise sont d’une froideur implacable. Notamment en ce qui a trait à l’oubli général ayant eu cours au sein de la population, trop heureuse de fêter, sitôt que les tocsins de la Libération eurent sonné. Même si tel n’est pas son but, La douleur nous redit les destins tragiques des familles de déportés, dans un devoir de mémoire important qui résonne encore aujourd’hui, dans un contexte totalement différent.

Finkiel (la plupart de sa filmographie est inédite dans les salles québécoises) tisse une toile où les intrigues, les rapprochements avec l’ennemi, les tensions larvées et les rapports d’attraction répulsion sont de mise. À la fois littéraire et visuelle, l’image est contrainte dans un cadre fébrile, montrant de près les longs moments de solitude de Marguerite. Mais aussi l’intensité de ses silences et des cris de désespoir. Certes, avec ses 126 minutes, quelques petites longueurs se font jour et les séquences finales – que nous ne pouvons évidemment pas décrire – ouvrent une brèche sur un ressort dramatique qui nous a semblé trop peu exploité. Mais quoi qu’il en soit, ne serait-ce que pour la performance envoûtante de Mélanie Thierry, au demeurant fort bien épaulée par des partenaires masculins investis dans leur rôle, La douleur est une œuvre rare, qu’il ne faut absolument pas rater.

Finkiel (la plupart de sa filmographie est inédite dans
les salles québécoises) tisse une toile où les intrigues, les
rapprochements avec l’ennemi, les tensions larvées
et les rapports d’attraction répulsion sont de mise.

Sortie
Vendredi 14 septembre 2018

V.o.
français; s.-t.a.
Memoir of Pain


Réal.
Emmanuel Finkiel

Genre
Drame

Origine
France

Année : 2017 – Durée : 2 h 01

Dist.
FunFilm

Horaires & info. @
Cinéma Beaubien
Cineplex

Classement
Tous publics

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]

2024 © SÉQUENCES - La revue de cinéma - Tous droits réservés.