10 janvier 2019
Si dans Ida, Paveł Pawlikowski nous avait emballé par son habileté à souligner subtilement la morale du plan à travers un récit minimaliste, confirmant pour ainsi dire l’originalité toujours actuelle du cinéma polonais, force est de souligner que La guerre froide n’atteint pas aussi loin l’élégance du film précédent.
Mais l’amour du cinéma est toujours présent à travers une histoire tirée de l’expérience de ses parents dans une Pologne d’après-guerre sujette aux nombreux bouleversements. Et dans cette atmosphère où le discours politique totalitaire est de mise, comment survivre à une histoire d’amour entre deux individus que presque tout oppose, sauf peut-être l’attrait l’un pour l’autre. Lui, l’intellectuel urbain qui cherche à préserver la musique et les chants folkloriques d’un pays qui traverse les premiers soubresauts du changement; de l’autre, une jeune femme de milieu rural, belle voix et pas tout à fait prête à entreprendre les premiers pas vers une évolution sociale.
Et on croit encore à la mise en scène de Pawlikowski, faite
de retenue, de refus du superflu, de raccourcis sublimes et
encore, comme dans Ida, d’une éthique du cadre exemplaire.
Lorsque le folklore d’un pays devient instrument politique (régime stalinien), les enjeux personnels prennent une tournure aussi inquiétante que subversive. Et on croit encore à la mise en scène de Pawlikowski, faite de retenue, de refus du superflu, de raccourcis sublimes et encore, comme dans Ida, d’une éthique du cadre exemplaire. Il y a Tomasz Kot, charismatique, élégant, jouant avec un naturel éblouissant le jeu de la séduction, mais montrant aussi une faiblesse bouleversante. Et Joanna Kulig, magnifique, filmée dans un noir et blanc dont les quelques gros plans de son visage illuminent l’écran et confère au film une aura transcendante oscillant entre la pureté et une sensualité à fleur de peau.
Et une scène finale subliminale qui nous réconcilie avec les images en mouvement. Un film de fougue et de tristesse, de douleur aussi, tout comme une toile abstraite désincarnée.
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