En salle

Sofia

9 mai 2019

| PRIMEUR |
Semaine 19
Du 10 au 16 mai 2019

RÉSUMÉ SUCCINCT
Sofia , en déni de grossesse et non-mariée, habite avec ses parents à Casablanca. Jusqu’à ce que sa cousine Léna, une étudiante en médecine, l’aide afin qu’elle puisse aller accoucher « illégalement ». L’hôpital lui donne toutefois un ultimatum de 24 heures : elle doit révéler l’identité du père, sans quoi les autorités seront contactées.

CRITIQUE >
Élie Castiel

★★★★

SANS BRUIT ET SANS FUREUR

Le Maroc, et plus particulièrement Casablanca, pour y avoir vécu, dans le cas des Musulmans et des Juifs, à une ère post-coloniale, selon la classe sociale (façon de parler), la grossesse hors-mariage est un délit, à moins que le géniteur reconnaisse l’enfant à naître. Chez les Juifs, on forcerait la jeune femme à l’exil si le coupable n’avoue pas sa faute et n’épouse pas la victime. Histoire des premiers désirs, surtout pour la femme, d’attrait, de sexualité à deux niveaux, l’une pour l’homme, libre de ses actes ; l’autre pour la femme (attention, il peut avoir péril en la demeure), cédant aux besoins biologiques sans arrière-pensées.

Et pour ce premier long métrage réussi de la franco-marocaine Meryem Benm’Barek-Aloïsi, le Prix du scénario de la section « Un certain regard », à Cannes 2018. Récompense presque suprême puisque non seulement elle situe le cinéma marocain dans la cour des grands, mais lui donne du coup droit de cité.

Séquences brèves, allant droit au but, décors admirablement choisis selon les circonstances, dialogues incisifs et intelligemment travaillés, en harmonie avec des personnages de toutes classes sociales. Si l’idée de collectivité, souvent maladive, règne dans un Maroc multi-confessionnel, le privé, s’il s’agit de sexe, engendre des conséquences alarmantes. Parce que la sexualité est attrayante, mais sale, parce que les choses du sexe ne se disent pas, mais se font en cachette, parce le sexe est interdit, et c’est pour cette raison qu’il faut en profiter.

Le vice et la vertu sont des choses que la jeune cinéaste montre avec un sens inégalé du détail. Présence accrue des femmes, celles par qui (faussement) le scandale arrive. Elle pechent, elles doivent payer. Et les hommes, presqu’invisibles, comme si la rue leur appartenait et qu’ils voyaient la maison, surtout lorsque de nombreuses femmes y habitent, comme des prisons. Surtout lorsque dans leur inconscient, ils savent bien qu’ils sont les véritables coupables, mais semblent s’en ficher. Et aussi parce que dans certaine régions du monde, les mères aiment plus leurs enfants mâles.

Et une cousine venue d’ailleurs qui vient résoudre un problème délicat et permet à Benm’Barek-Aloïsi de réaliser l’un des plus beaux film sur la femme actuelle. Non pas seulement la marocaine, mais la femme tout simplement. Un suspense social sur la sexualité féminine mené tambour battant, mais avec grâce et sans bruit. Quant à Maha Alemi, la principale intéressée dans ce (mélo)drame de quartier, tout à fait magistrale dans sa timidité, sa détermination et plus que tout, sa majestuosité maternelle. Sofia, en grec « sagesse ». Qualité que la femme doit exercer sans cesse.

Si l’idée de collectivité, souvent maladive, règne dans un Maroc multi-confessionnel, le privé, s’il s’agit de sexe, engendre des conséquences alarmantes. Parce que la sexualité est attrayante, mais sale, parce que les choses du sexe ne se disent pas, mais se font en cachette, parce le sexe est interdit, et c’est pour cette raison qu’il faut en profiter.

FICHE TECHNIQUE
Sortie
Vendredi 10 mai 2019

Réal.
Meryem Benm’Barek Aloïsi

Origine(s)
France / Qatar

Maroc / Belgique

Année : 2018 – Durée : 1 h 26

Langue(s)
V.o. : français, arabe / s.-t.f.

Sofiâ

Genre(s)
Drame social

Dist. @
FunFilm

Classement
Tous publics

En salle(s) @
Cinéma Beaubien Cinéma du Musée
Cinéma Moderne

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel.  ★★★★ Très Bon.  ★★★ Bon.
★★ Moyen.   Mauvais. 0 Nul.
½ [Entre-deux-cotes]

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